Les promesses d’une autre justice

par Bernard Perret

A propos du film « Je verrai toujours vos visages »

La Justice restaurative (ou restauratrice) propose à des personnes victimes et auteurs d’infraction de dialoguer dans des dispositifs sécurisés, encadrés par des professionnels et des bénévoles, sans interférer avec l’exécution des sanctions pénales. Pratiquée depuis la fin des années 1980 au Canada, elle a été introduite en France par la loi du 15 août 2014 et mise en œuvre à partir de 2017. Le film de Jeanne Herry est le premier consacré à cette nouvelle forme de justice. C’est un film engagé qui rend un hommage appuyé aux bénévoles et aux travailleurs sociaux, mais c’est surtout une œuvre magistrale, pétrie d’humanité, portée par une brochette de grands acteurs.

Le film entrecroise deux histoires. La première est celle des rencontres hebdomadaires, dans les murs de la prison, de Nassim, Issa, et Thomas, condamnés pour vols avec violence, avec Grégoire, Nawelle et Sabine, victimes de homejacking, de braquages et de vol à l’arraché. Le dialogue s’engage, sans concession, entre des victimes dont la vie est durablement pourrie par la peur et la colère et des auteurs d’agression qui tentent de se justifier en évoquant leur enfance et la lutte pour la vie dans un monde qui ne leur fait aucun cadeau. Au fil des rencontres, on voit se construire non sans douleur l’espace d’une communication et d’une reconnaissance mutuelle, jusqu’à laisser entrevoir la perspective d’une guérison, pour les uns comme pour les autres : les victimes s’apaisent et les agresseurs sortent du déni. Le second récit est celui d’une médiation à haut risque entre Chloé, victime de viols incestueux dans son enfance, et son frère violeur, autrefois tant aimé, tout juste sorti de prison. Informée que son frère revient vivre dans la ville où ils ont grandi, elle veut le voir afin qu’ils se mettent d’accord pour éviter de se rencontrer. Mais elle veut aussi lui poser les questions qui la taraudent. Pas vraiment de pardon ici, mais un échange de paroles sincères qui, on peut le penser, apportera à Chloé comme à son frère une certaine paix. Il s’agit bien-sûr de fictions, mais tout indique que le film met en scène des situations qui peuvent réellement exister. 

Quel rapport avec la théorie mimétique ? Tout d’abord, comme l’indique le titre du film, le thème du visage est central : c’est en se faisant face que des individus séparés par un abîme de ressentiment et d’incompréhension apprennent à se reconnaître comme des êtres humains. On pense ici au philosophe Emmanuel Lévinas, chez qui l’expérience d’autrui prend la forme du visage, mais aussi aux travaux sur les neurones miroirs, qui montrent l’importance des regards échangés comme vecteurs d’une communication infra-langagière. On pense aussi aux commentaires des récits évangéliques de la trahison de Pierre et de la femme adultère par René Girard : les regards échangés, ou évités, sont, dans les deux cas, au cœur de sa lecture mimétique des rapports humains.  

L’efficacité sociale d’une justice non sacrificielle

L’apport majeur de ce film est de donner corps à une autre idée de la justice. Il ne s’agit certes pour l’instant que d’expériences limitées – on devine la difficulté de trouver des professionnels et des bénévoles, mais aussi des détenus et des victimes volontaires. Par ailleurs, redisons-le, la justice restaurative ne remplace pas la justice punitive : les peines de prison sont exécutées. Mais il n’en demeure pas moins que le film donne à voir une justice qui ne se contente pas d’exorciser violemment la violence mais vise la réconciliation et l’inclusion – en termes girardiens, une justice non sacrificielle. Ce qu’il faut souligner, c’est que la justice restaurative atteint, au moins dans les cas favorables, une forme d’efficacité sociale incomparablement supérieure à celle de la justice punitive : les victimes, quoi qu’elles en pensent au départ, retirent de ces échanges un apaisement qui va bien au-delà de celui qu’apporte la trouble satisfaction de savoir les coupables se morfondre dans leur prison. Surtout, les risques de récidive sont moindres pour des délinquants ayant pris, de manière à la fois rationnelle et émotionnelle, la mesure de leurs responsabilités dans les souffrances endurées par les victimes. Ce constat suggère une réflexion plus générale sur l’impact civilisationnel des ferments anti-sacrificiels présents dans notre culture – dont le « souci des victimes » est l’une des manifestations, témoignant selon René Girard des effets au long cours de la révélation chrétienne. Loin d’être seulement des facteurs « apocalyptiques » de délégitimation des pouvoirs et de déstabilisation de l’ordre social établi, ils sont susceptibles de s’incarner dans des pratiques sociales viables, de s’incorporer dans de nouvelles logiques institutionnelles et de participer d’une forme de progrès [1].   

Résonances théologiques

Il n’est jamais question de Dieu dans ce film, à peine du pardon, et rien n’autorise à en faire une œuvre d’inspiration chrétienne. Mais il n’en a pas moins de profondes résonances théologiques. Il offre en effet une analogie suggestive pour penser la justice divine, apportant ainsi un élément de réponse à une question lancinante posée par la théorie mimétique. Si la violence est la figure centrale du mal, Dieu doit en être exempt, et c’est d’ailleurs ce que René Girard n’a cessé d’affirmer. Penser Dieu comme étranger à toute violence est d’autant plus nécessaire que Jésus en fait un modèle de non réciprocité à imiter [2]. Il n’en demeure pas moins qu’il est impossible pour un chrétien de renoncer totalement à l’idée d’une Justice divine transcendant la justice humaine – une justice, qui plus est, irréductible aux conséquences immanentes de la violence, fussent-elles apocalyptiques. L’une des tâches de la théologie post-girardienne est donc d’élaborer un concept de justice divine non sacrificielle. Or, la pensée théologique a besoin de modèles humains, de réalités connues par expérience à partir desquelles des raisonnements analogiques peuvent être construits – c’est ce qu’a fait, par exemple, Anselme de Cantorbéry avec sa « théologie de la satisfaction ». Si l’on suit James Alison, il est dit dans Jean 16, 7-11 que, sous l’action de l’Esprit, « toute notre compréhension de ce que sont le péché, la justice et le jugement sera complètement remodelée. » (12 leçons sur le christianisme). Dans d’autres textes, James Alison tente d’imaginer ce que cela pourrait signifier pour la Justice divine. En voici deux exemples :

« Il est permis d’espérer que la justice divine sera autre chose qu’une violente séparation entre les bons et les mauvais, opérée par un Dieu vengeur. » (Raising Abel)

« Le Jugement dernier n’est pas simplement l’effondrement de l’histoire et le début de l’ « éternité ». Il est la manifestation de l’histoire telle qu’on l’a construite pour qu’elle puisse participer à la vie divine et non s’effacer dans la vanité et l’insignifiance de la violence. Nous en avons l’assurance par le fait que ce sont les victimes pardonnantes qui seront les juges, les principes de manifestation de la réalité de l’histoire : ce seront elles qui auront rendu possibles la continuité entre cette Création-ci et la nouvelle Création. » (Le péché originel à la lumière de la Résurrection)

Telles qu’elle est montrée dans le film, la justice restaurative fournit un précieux point d’appui pour imaginer une justice divine non vengeresse, qui soit avant tout une confrontation douloureuse à la vérité participant d’une nouvelle création à partir de tout ce qui a été si mal fait dans ce monde-ci.


[1]    Je développe cette idée au chapitre 5 de mon livre Violence des dieux, violence de l’homme – René Girard, notre contemporain (Seuil 2023)

[2]    Mt. 5 : 44

13 réflexions sur « Les promesses d’une autre justice »

  1. Merci Bernard pour ce précieux article. Je le diffuserai dans l’association d’aide aux justiciables dont je fais partie en tant que visiteur de prisons (public acquis à cette cause, il est vrai). Plusieurs détenus que je visite m’ont fait part de leur désir de rencontrer leurs victimes. De mon expérience (limitée), c’est plutôt du côté des victimes que ça coince.

    J’aime

  2. Très bon article.
    Voilà comment faire progresser en effet une vision non sacrificielle de la justice.
    Enfin pas un article absurde sur le wokisme et le mal que représenteraient les pauvres et les minorités abjectes lyncheurs quand évidemment ceux qui nous gouvernent sont de pure images du christ (ce qui est évidemment absurde théologiquement).

    J’aime

  3. le cinéma est le plus religieux de tous les arts, parce qu’il place l’homme devant l’essentiel des choses et nous montre l’âme dans le corps. (Jean-luc godart)

    J’aime

  4. Je ne suis pas sûr de comprendre ce qu’on appelle ici « justice sacrificielle ». Girard distingue (La violence et le sacré, VS, Grasset, p. 38) parmi les « moyens mis en œuvre par les hommes pour se protéger de la vengeance interminable […] : 1) les moyens préventifs […] ; les aménagements et entraves à la vengeance […] ; le système judiciaire dont l’efficacité curative est sans égale ». Plus loin (p. 39), il écrit : « Le point de rupture se situe au moment où l’intervention d’une autorité judiciaire devient contraignante. Alors seulement, les hommes sont libérés du devoir terrible de la vengeance. » Plus loin encore (p. 41) : « Le système judiciaire et le sacrifice ont donc en fin de compte la même fonction mais le système judiciaire est infiniment plus efficace ».

    J’aime

    1. Girard n’utilise pas l’expression « justice sacrificielle », mais il dit à de multiples reprises et sous différentes formes que toutes les institutions procèdent du sacrifice et qu’elles ne peuvent contrôler la violence qu’en incorporant une certaine forme de violence, et en restant tributaire, d’une manière ou d’une autre, de la logique sacrificielle. Il ne dit certes pas que la justice et le sacrifice sont la même chose, mais que la justice conserve un caractère sacrificiel – elle a pour fonction de purger la violence en instituant une vengeance de dernier ressort exercée au nom de la collectivité, dont elle affirme au passage la transcendance à l’égard des individus. Entre le sacrifice et la justice, il y a donc à la fois rupture et continuité. Voici quelques citations tirées de La Violence et le Sacré :

      « Derrière la différence à la fois pratique et mythique, il faut affirmer la non-différence, l’identité positive de la vengeance, du sacrifice et de la pénalité judiciaire. C’est bien parce que ces trois phénomènes sont les mêmes qu’ils tendent toujours, en cas de crise, à tous retomber dans la même violence indifférenciée. »

      « Seule une transcendance quelconque, en faisant croire à une différence entre le sacrifice et la vengeance, ou entre le système judiciaire et la vengeance, peut tromper durablement la violence. »

      « Les procédés qui permettent aux hommes de modérer leur violence sont tous analogues, en ceci qu’aucun d’eux n’est étranger à la violence. Il y a lieu de penser qu’ils sont tous enracinés dans le religieux. Le religieux proprement dit ne fait qu’un, on l’a vu, avec les divers modes de la prévention ; les procédés curatifs sont eux-mêmes imprégnés de religieux, aussi bien sous la forme rudimentaire qui s’accompagne, presque toujours, de rites sacrificiels, que sous la forme judiciaire. »

      Toujours dans La violence et le sacré, Girard reprend à son compte cette analyse de l’anthropologue Louis Gernet à propos de la peine de mort :

      « La peine de mort fonctionne comme moyen d’élimination d’une souillure… elle se manifeste… comme libération purificatoire du groupe parmi lequel la responsabilité d’un nouveau sang versé se dilue parfois et s’évanouit (ce peut être du moins le cas dans la lapidation). Ensuite, l’expulsion violente,l’expulsion dans la mort du membre indigne et maudit s’accompagne d’une idée de devotio. D’une part en effet, la mise à mort apparaît comme un acte pie : qu’on rappelle ces dispositions du droit antique où il est spécifié que le meurtre du hors-la-loi ne fait pas tort à la pureté, ou cette prescription du droit germanique qui fait d’un pareil meurtre un devoir… D’autre part, c’est une véritable fonction religieuse que l’exécuté lui-même remplit en pareil cas ; une fonction qui n’est pas sans analogie avec celle des rois-prêtres qu’on exécute également, et qui se témoigne assez dans la désignation du criminel comme homo sacer à Rome, comme pharmakos en Grèce. »

      J’aime

      1. Même chez Girard, on peut trouver des citations qui se contredisent ! Mon point était que l’expression « justice sacrificielle » laisse penser que la justice est un prolongement, ou disons plutôt, une modalité particulière, du sacrifice. Ce que je ne pense pas. Mais évitons une querelle sémantique stérile.
        Pour revenir à votre proposition de départ, je rappellerai simplement que la justice restaurative intervient après que la justice punitive soit passée (ce que vous faites aussi d’ailleurs). Mais vous écrivez dans votre article « …la justice restaurative atteint, au moins dans les cas favorables, une forme d’efficacité sociale incomparablement supérieure à celle de la justice punitive ». Même si je vois comme vous tous les mérites de ces rencontres entre agresseurs et victimes, je doute qu’elles puissent jamais se substituer à la justice punitive.
        Pour finir, je trouve très intéressante la remarque d’Hervé van Baren sur le fait que ce sont plutôt les victimes qui sont réticentes à entrer dans le processus…

        J’aime

    2. Il faut revenir au désir mimétique et à la réciprocité violente qu’il suscite. La justice rétributive fait partie de ces artifices « sacrificiels » que nous avons mis en place pour contrecarrer cet invariant humain. La justice restaurative se distingue en ce qu’elle appelle à une résolution non rétributive de la crise qui découle de l’acte violent. Il n’y est pas question de « payer sa dette », mais bien de la mobilisation de toute la communauté pour « réparer » le mal commis, autrement dit, par une parole libre, de sortir tous les intervenants – auteur(s) du crime, victime(s) et membres de la communauté – de leur logique rétributive. C’est une révolution qui va bien au-delà d’une simple réforme de la justice, comme le montre Bernard dans l’article.

      J’aime

  5. L’article est intéressant de concerner la justice dans ses multiples dimensions et de déborder sur le Jugement dernier.
    La justice définit les interdits. Elle s’impose aux justiciables (plaignants et accusés), concerne des actes précis commis par des individus au cours de leur vie. La justice réparatrice est fondée sur le volontariat. Elle a lieu dans un cadre moins rituel que le tribunal mais toujours ritualisé d’être encadrée par des tiers avec un langage qui reste contrôlé. Elle s’insère dans un manque que le jugement ne semble pas combler : « les victimes s’apaisent et les agresseurs sortent du déni ». Les uns et les autres auraient le désir de faire entendre leur récit contre le récit de l’autre jusqu’à aboutir, quand tout va bien, à un récit commun qui serait le mythe.

    Ce mythe réparateur pourrait-il avoir un effet pervers ? Imaginons que plus tard, une de ces personnes victimes soit jugée coupable par la justice (par exemple, d’avoir écrasé un chien pendant un excès de vitesse, d’avoir harcelé un subordonné) et que le propriétaire, le subordonné propose une justice réparatrice. Est-ce que ce ne sera pas plus difficile pour cette personne de sortir du déni ? Elle était Victime, elle devient victime un jour, agresseuse un autre, elle découvre que le bon grain est inextricablement lié à l’ivraie.

    En même temps qu’émerge cette justice réparatrice, on perçoit de plus en plus notre société comme un tribunal permanent, via la « libération de la parole » et les accusations lancées hors du cadre judiciaire. Le souci des victimes côtoie cette mise en accusation générale allant parfois jusqu’à une vision radicale partageant le monde entre les Victimes et les Agresseurs, la Victime l’étant par essence. Cette vision peut conforter le déni et le refus de communiquer avec l’autre ainsi que la critique de la justice légale et de ses limitations.

    Ce qui amène à la justice divine. Elle s’impose, elle ne dépend pas d’un code pénal, elle concerne toute la vie de l’individu, elle se fait en face à face. Elle révèle une autre vérité : que nous sommes pécheurs, que personne n’est sans péché (à part la Vierge Marie). Ainsi, « toute notre compréhension de ce que sont le péché, la justice et le jugement sera complètement remodelée » comme dit Alison. On peut concevoir qu’au Jour du Jugement, chacun sans exception trouvera trace en lui de pardons en pointillé côtoyant de gros aveuglements volontaires ou pas, sur fond de satisfaction. Ce Jour sera aussi la fin du péché originel (la séparation du bon grain et de l’ivraie) après sa pleine mise en lumière.

    Dans ce contexte, il me semble que la citation d’Alison sur les victimes pardonnantes (« Nous en avons l’assurance par le fait que ce sont les victimes pardonnantes qui seront les juges… ») prête à malentendu. Ces victimes pardonnantes ne sont pas des humains devenus justes parce qu’ils ont pardonné, et par suite appelés pour juger les vivants et les morts avec bienveillance à la place ou en assistants du Christ. Cette vision ressemble trop aux récits mythiques actuels séparant les Victimes par essence de leurs Agresseurs sans excuse. C’en est même effrayant et personnellement je n’ai aucune envie d’être jugée par des victimes pardonnantes. J’aurais l’impression d’être dans un tribunal de l’Inquisition :). Je préfère être jugée par le Christ car il désire tous nous sauver et l’a prouvé en mourant pour nous. La justice divine se présente en lui comme protection, ce qu’est aussi, malgré son imperfection, la justice humaine.

    J’aime

  6. « Or voici ce qui est intéressant maintenant : puisque l’Esprit est à l’œuvre pour resignifier le sens partout où il y a un sens humain, il peut le faire tout à fait indépendamment de la communication formelle de l’Évangile. C’est-à-dire qu’elle est à l’œuvre tout au long de la crise qui est l’état normal de l’humanité, faisant surgir des choses anciennes et nouvelles. La crise formée par notre chute dans le symbolique n’est pas de celles qui peuvent être résolues. Il n’y a pas de stabilité juste au coin de la rue. Aucune paix humaine ordinaire qui a été temporairement interrompue. Ce qu’il y a, c’est aussi, et elle existe simultanément à cette crise, une capacité à faire des signes des moyens de participation à la nouvelle création par le pardon qui devient une réalité humaine parmi nous. Une capacité souvent refusée, mais toujours présente. »

    https://jamesalison.com/fr/repenser-la-sacramentalite-apres-rene-girard/

    La justice, humaine dans le sens où le divin ne peut s’incarner qu’en sa créature devenue consentante, est donc la capacité humaine à savoir créer les conditions du pardon dans le nouveau référentiel fraternel de nos représentations géométriques :

    « Veuillez noter ce que cela signifie : notre fausse transcendance tend à être projetée vers une « sphère vers le haut, ou verticale ». Les sacrificateurs essaient de persuader un dieu extérieur d’intervenir avec force au milieu de nos affaires humaines du côté du groupe sacrifiant. Mais la véritable transcendance, celle qui nous a été effectivement rendue accessible par la Passion du Christ, habite toujours une sphère latérale ou horizontale. Le Saint-Esprit est le Dieu intermédiaire, nous créant et nous recréant à travers ce qui est entre nous.

    C’est pourquoi, après la mort du Christ, il n’y a plus de « sacrifices » dans le christianisme. Car la projection d’une relationalité mal vécue conduit le « soi », qu’il soit d’un groupe ou d’individus, à se protéger contre « un autre » ou à prendre du sens contre « un autre ». Tandis que l’impulsion par des signes de relationalité bien vécue se dirige vers l’autre, se lie d’amitié et tend à embrasser l’autre : défaire la rivalité, la vengeance, etc. La vraie transcendance est à côté de nous : la relocalisation fraternelle de Dieu par Jésus. »
    Ibid.

    Il est donc l’heure de la confiance car le Christ est un modèle humain, dans la mesure où nous acceptons le signe divin qui nous propose d’en imiter l’incarnation, ô miracle de la foi, car il suffit d’y croire comme les petits enfants de singe que nous sommes, pour accéder, sans se soumettre ni dominer, à l’horizontalité de la verticale, au triomphe de la croix, à la toute faiblesse humaine du Dieu tout puissant qui nous accompagne fraternellement en cette crise de la mue humaine des chrysalides du sacré vengeur au mirifique et saint papillon du pardon:

    « La distinction entre le sacré et le saint qui a commencé à émerger lorsque Girard lui-même a accepté l’impossibilité d’un autre mot pour un sens positif du sacrifice, marquerait-elle l’indice d’une nouvelle source d’intelligibilité de la crise[6] ? Une nouvelle capacité à discerner comment nous nous impliquons dans toute péripétie de la crise sacrificielle où nous nous trouvons. La sacramentalité n’est pas le domaine des signes muets. Il y a toujours des mots interprétatifs qui forgent un nouveau sens. Comment pourrions-nous, relativement indépendamment de l’appartenance religieuse formelle, découvrir avec les outils linguistiques que Girard nous a donnés, une participation créatrice aux signes faibles que le pardon continue à rendre vivants alors même que la violence de la crise qu’est l’être humain tente sans cesse de nous faire revenir à l’ancien et au plus simple, aux vieilles outres du sacré. »
    Ibid

    Questo è un nodo avviluppato,
    Questo è un gruppo rintrecciato.
    Chi sviluppa, più inviluppa,
    Chi più sgruppa, più raggruppa;
    Ed intanto la mia testa
    Vola, vola, e poi s’ arresta,
    Vo’ tenton per l’ aria oscura,
    E comincio a delirar.

    Aimé par 1 personne

  7. Justice sacrificielle, justice restaurative (ou réparatrice, ou même alternative), justice punitive, justice rétributive, justice divine… Je m’y perds !
    Je ne conteste nullement que l’institution judiciaire ait comporté des éléments sacrificiels. Il me semble néanmoins que ces éléments s’estompent de plus en plus. Songeons seulement au supplice d’Urbain Grandier en 1634, brûlé vif devant 6000 personnes à Loudun (après procès et recherche/fabrication de preuves). Songeons aussi que la peine capitale n’a cessé d’être publique en France qu’en 1939.

    J’aime

  8. Il n’y a pas, à proprement parler, de « justice divine ». Les tympans de nos églises représentent des mythes. Il n’y a pas de châtiment divin. Dieu est amour, point final.

    J’aime

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

%d blogueurs aiment cette page :