
La dernière livraison de la revue semestrielle du MAUSS est passionnante pour les girardiens. J’en ferai très bientôt une recension ici même. Intitulée « La violence et le mal, Girard, Mauss et quelques autres », elle contient principalement les actes d’un colloque (16 mars 2019), organisé par l’ARM, dont les participants ont mis en rapport la pensée de René Girard et celle de Marcel Mauss.
Dans son prologue, ce numéro du MAUSS revient sur une critique adressée à Girard par Jacques T. Godbout, un sociologue d’obédience maussienne, à propos du Jugement de Salomon. Critique à laquelle René Girard avait, une fois n’est pas coutume, répondu. Aimablement mais pas efficacement, puisqu’en 2020, Jacques Godbout, insatisfait de la réponse girardienne, apporte une réponse à cette réponse. Cette « réponse » ne peut s’adresser qu’à nous, lecteurs de Girard et qui plus est, girardiens. J’ai donc décidé de reprendre la discussion ici, dans l’intimité de ce blogue et en comptant sur le fait que beaucoup de nos abonnés connaissent déjà à la fois le texte biblique et la teneur de ce « débat », publié dans le numéro des Cahiers de l’Herne consacré à Girard. (1)
Comment en effet, ne pas réagir à la critique que Jacques Godbout, en 2008, adresse à la théorie mimétique : « Il n’y a pas d’amour possible dans ce système d’explication, seulement de la haine et du « désir » dont les conséquences sont nécessairement épouvantables », écrit-il. Pour apporter la preuve de ce qu’il avance, le sociologue s’empare de l’interprétation girardienne du Jugement de Salomon. On supposera cette fois que tous nos lecteurs savent de quoi il s’agit : le Jugement de Salomon est un texte présent à l’esprit de René Girard dans quasiment tous ses ouvrages, toutes ses conférences et toutes ses interviews ! En ce qui me concerne, depuis ma lecture des Choses cachées, je n’ai jamais pu lire et relire ce texte sans éprouver une certaine émotion. (2)
Sur quoi se fonde la critique que l’homme du MAUSS adresse à Girard ? Essentiellement sur le fait que Girard relativise l’amour maternel, le juge « secondaire » dans cette histoire de rivalité maternelle. (3) Cela peut paraître étrange, en effet. N’est-ce pas parce qu’elle est la « vraie mère » de l’enfant vivant que la bonne prostituée supplie le roi de ne pas trancher l’objet du litige en deux parties égales et de le donner tout entier à sa rivale ? La logique girardienne, selon Godbout, aurait nécessité que l’enfant fût tranché. Or, « la célèbre « sagesse du roi Salomon » réside précisément dans ce pari qu’il a fait que la logique de l’amour allait l’emporter et faire éclater la logique girardienne qu’il propose aux deux femmes. » Finalement, constate Godbout, Girard n’a pas vu que le seul personnage qui donne raison à sa théorie de la rivalité mimétique est la fausse mère mais, justement, à cause de cela, elle est perdante ! Girard n’a pas vu que la condition même de l’efficacité de la ruse royale est que sa théorie mimétique soit inopérante. Le roi et la « vraie mère » ont des conduites qui obéissent de toute évidence à une logique non girardienne.
Quelle est cette logique ? La logique de l’amour, on l’a dit, et d’un modèle assez « banal » : la logique de « l’amour maternel, qui a toujours existé et qui transcende continuellement la logique de la violence mimétique. » Et comme Girard fait de la « vraie mère » une figura Christi, Godbout ajoute : « Nul besoin de recourir au Christ pour reconnaître son existence (l’existence de l’amour maternel) dans toute l’histoire de l’humanité. » Avant d’en venir à la réponse de René Girard, je voudrais juste faire une remarque : il y a belle lurette qu’un certain féminisme instruit et réfléchi, dans le sillage de Simone de Beauvoir, (4) a réglé son compte à l’instinct maternel et à l’amour qui s’ensuit ; la maternité humaine a une histoire, relève d’une culture et éventuellement d’un choix personnel. Il en découle que la « vraie mère » selon le cœur, selon la loi et aussi selon la lecture girardienne, comme on va le voir, n’est pas nécessairement la mère biologique.
La réponse de René Girard rappelle d’abord que si l’amour maternel est « banal », le désir mimétique l’est tout autant. La différence est que ce désir-là et ses formidables conséquences passent inaperçus : « C’est pour cela que je m’en occupe » dit-il simplement. Ensuite, dit-il, il faut prendre en compte le contexte du récit biblique : le sacrifice des enfants, particulièrement des premiers-nés, était une institution chez les voisins des Hébreux, institution suffisamment installée pour que les prophètes ne cessent de vitupérer contre ces pratiques. J’ajoute : la solution proposée par le roi, sortir d’une situation indécidable en donnant à chacune des mères une part égale, est à la fois sacrificielle (il s’agit de sacrifier l’enfant pour réconcilier les mères) et humaniste : le « cœur intelligent » que Salomon a reçu de Dieu lui permet de prévoir que la « vraie mère » refusera qu’on tue l’enfant.
Mais l’essentiel de la réponse de Girard est dans les dernières lignes de son texte : la bonne prostituée est une figura Christi parce qu’elle agit selon l’amour, pour que l’enfant vive : c’est le sacrifice de l’amour maternel par lui-même.
Il me semble que cette réponse aurait pu satisfaire Jacques Godbout. Loin de refuser l’existence d’une logique de l’amour venant contrecarrer la logique de la violence, celle de la rivalité mimétique, René Girard lit le Jugement de Salomon à la lumière d’une révélation : celle de la possibilité d’un don inconditionnel. Tel est le don que fait la « vraie mère » à sa rivale, le don de son enfant, dicté par l’amour. Girard refuse même, dans Les Choses cachées, de nommer « sacrifice » ce don de soi. Alors, qu’est-ce qui ne va pas ?
Dans sa réponse d’aujourd’hui à René Girard, le sociologue du MAUSS souligne son intérêt pour « les choses cachées » révélées par Girard. Il lui reproche seulement cette hégémonie du désir mimétique. « Pour nous, écrit-il, le don n’explique pas tout ». Laissons cela pour revenir au jugement de Salomon. Godbout prétend maintenant qu’il s’est agi d’un faux débat. Salomon a misé à la fois sur l’amour maternel et sur la rivalité mimétique. Mais il ne peut s’empêcher d’ajouter : « Salomon a fait le pari du don et s’il avait eu la même vision du monde que René Girard, il n’aurait tout simplement pas fait ce pari. » En réalité, selon nous, c’est tout le contraire : il fallait au roi une profonde connaissance des mécanismes du désir pour faire ce pari, il lui fallait surtout s’être libéré de l’emprise de la violence sacrificielle pour pouvoir ruser avec elle. N’oublions pas que pour Girard, le Jugement de Salomon vient illustrer l’inspiration anti-sacrificielle de l’Ancien Testament.
Contrairement à Jacques Godbout, je pense que René Girard lui-même, bien sûr mais aussi sa théorie, ont plus d’affinités avec Salomon, qui connaît les effets du désir mimétique, qu’avec la mauvaise prostituée, qui, les ignorant, en est victime. Certes, la vision du monde de René Girard n’est pas fondée sur une confiance totale dans la bonté des mères mais, comme Salomon, il sait que l’amour maternel existe. La question est : le lien entre mère et enfant est-il nécessairement de l’ordre de l’amour ? Devant le roi, il est question de maternité mais pas d’amour, chacune des deux femmes réclame son droit, ce qui lui appartient. Godbout le dit : la ruse du roi est bien une sorte de pari. Pourquoi ? Parce que L’amour maternel n’est pas la cause de ce drame, il en est la résolution sacrificielle : ce n’est pas parce qu’elle est la vraie mère que la bonne prostituée fait le don de l’enfant à sa rivale, c’est parce qu’elle fait ce don, parce qu’elle renonce à sa maternité pour que l’enfant vive, qu’elle en est la vraie mère.
La raison pour laquelle le sociologue du MAUSS reste convaincu que le Jugement de Salomon lance un défi à la théorie mimétique ne vient pas de son refus de la rivalité mimétique, qu’il accepte tout en la « remettant à sa place ». Ce qu’il n’accepte pas, c’est sans doute l’idée girardienne, augustinienne, de la transcendance de l’amour. Il garde l’idée, la plus répandue à propos de ce célèbre « jugement », que le véritable héros de l’histoire et l’artisan de paix est l’homme sage, Salomon, celui qui connaît la nature humaine et qui exploite ici habilement les ressources de l’amour maternel. A contrario, la vision girardienne du salut, qui s’exprime dans le choix qu’il fait de la vraie mère comme « figura Christi », tourne le dos à cette rationalité. Pour lui, le salut est de l’ordre d’une conversion individuelle. Et donc, la ruse du monarque ne fait que créer les conditions de la conversion d’une mère éplorée, réclamant son dû, en « vraie mère » baignée par la grâce : elle sort du cercle mimétique, son amour de l’enfant transcende son propre désir d’appropriation, elle incarne, ne serait-ce que fugitivement, l’amour divin.
Ultime remarque : le texte biblique parle de la « sagesse divine » de Salomon. Pour « humaniser » le récit, comme le souhaite J. Godbout, il suffirait de parler de « sagesse » tout court, fondée sur une donnée de l’expérience, voire une loi naturelle, le banal amour maternel. Cependant, dans cette perspective, le « don » de la vraie mère n’a plus rien d’un événement spirituel et je me demande même s’il pourrait encore être qualifié d’événement. Et alors, quid du « Jugement de Salomon » ? Une décision de justice avec les moyens du bord, en attendant la découverte de l’ADN ?
- Cahier de l’Herne « René Girard », sous la direction de Mark R. Anspach, 2008
- Je résume : deux prostituées, mères à peu près en même temps, dont l’une a perdu son nourrisson dans la nuit, réclament toutes deux l’enfant vivant devant le roi Salomon. Ne pouvant trancher le cas, Salomon ordonne de couper l’enfant en deux pour le partager entre les deux mères. L’une d’elles supplie le roi : « Qu’on lui donne l’enfant, qu’on ne le tue pas ! » Le roi dit « C’est elle la mère ! » et lui donne l’enfant vivant. (1 R 3, 16-28)
- « Pour dévoiler jusqu’au bout la signification christologique du jugement de Salomon, il faut reconnaître que les implications familiales auxquelles il paraît se limiter, le caractère maternel de l’amour qui est ici en jeu sont en réalité secondaires et il faut les relativiser. » Des choses cachées, 1972, chapitre III, E, le jugement de Salomon.
- Par exemple, l’ouvrage de ma contemporaine, Elisabeth Badinter : L’amour en plus, une histoire de l’amour maternel du 17ème au 20ème siècle. Flammarion, 1980.
Merci à Christine Orsini de relancer ce débat qui élève le fameux jugement à des hauteurs insoupçonnées. Que la vraie mère, par le don/sacrifice de son enfant, soit une figura Christi, voilà ce que l’article éclaire. Mais ne donnons-nous pas à cette expression une signification trop réduite ? Salomon, dans sa sagesse, n’est-il pas lui aussi une figura Christi ? Non pas en tant que héros, sauveur providentiel et gardien de la justice et de la vérité ; mais, comme le dit Christine Orsini, par sa connaissance exceptionnelle de l’âme humaine, et surtout par la façon dont il utilise ce savoir. Car il me semble que l’intervention de Jésus dans les affaires humaines vise avant tout à élever ses interlocuteurs à un niveau de conscience qui leur permette de résoudre leurs conflits par eux-mêmes. Intervention parfaitement respectueuse de notre liberté, comme Jésus l’exprime dans la péricope de la guérison de la fille d’une femme cananéenne (Matthieu 15, 21-28) : « Femme, ta foi est grande ! Qu’il t’arrive comme tu le veux ». Et il me semble que la « ruse » de Salomon participe d’une intervention du même ordre.
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Oui, bien sûr, cet épisode est bien nommé « le jugement de Salomon ». René Girard en fait l’interprétation dans un chapitre des « Choses cachées » consacré à la critique de la lecture sacrificielle de la passion. Le Jugement de Salomon, comme l’histoire de Joseph et ses frères, illustre l’inspiration anti-sacrificielle de l’Ancien Testament. Je voulais surtout répondre à Jacques Godbout que ce « don » inconditionnel que fait la vraie mère ne relève pas (seulement) d’une loi naturelle, dont le roi aurait une juste approche et à laquelle la vraie mère se soumettrait. Si c’est un acte de liberté, ce n’est pas un acte de soumission à une loi naturelle. C’est pourquoi cet « amour maternel » ne peut être est mieux interprété et mis en lumière qu’à partir de la rivalité mimétique, qu’il est capable de transcender.
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Merci de revivifier cet événement de l’analyse girardienne du jugement de Salomon, qui permet de poser la question essentielle, nommant ce creux dans notre langage qui ne sait, comme l’affirme Rimbaud dans « Mauvais sang », s’exprimer sans paroles païennes, alors que la sensation oracle est très certaine qu’accéder au don de soi de la mère qui renonce à s’approprier son enfant n’est plus un mouvement sacrificiel, mais un renoncement au désir d’appropriation de l’enfant, arrivant à ce geste effectivement paradoxal de sacrifier le sacrifice, nous faisant accéder à cette zone mentale inconnue où nous pourrions imaginer pouvoir, en renonçant à la structure sacrée induite par lui, nous en désaccoutumer entièrement, réinventant alors nos structures sociales sur la mutualité du don désintéressé.
Michel Serres dans son dernier livre, il me semble, aborde par un autre angle le sujet :
« A partir d la naissance du Christ,une ère neuve se lève, où la parenté ne se fondera plus en nature, même du ventre d’une femme, mais selon le précepte évangélique : aimez-vous les uns les autres. »
Ainsi, , pouvons-nous être à même d’inventer en nos interactions libérées de tout sacrifice un langage sain et saint nous permettant sans crainte d’exprimer la vérité et la vie, ce chemin sans chemin tout tracé par Celui qui, s’offrant en sacrifice, nous permet alors de nous en passer.
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Merci de cette citation lumineuse de Michel Serres. Mais en 2020 après la naissance du Christ, où il est devenu vrai que « la parenté ne se fonde plus en nature, même du ventre d’une femme », n’est-ce pas le fait de prouesses technologiques et de nouveaux paradigmes familiaux plutôt que du précepte évangélique ? On se demande encore « qui est la vraie mère », mais le choix n’est plus restreint à une alternative entre celle qui tient encore plus à déposséder sa rivale qu’ à posséder l’enfant et celle qui l’aime au point de se déposséder d’elle-même. On se demande si un enfant peut avoir deux mères au lieu d’une seule, par exemple. On va hésiter entre celle qui l’a conçu, celle qui l’a porté, celle qui s’engage à l’élever etc. et avec les tests ADN, il n’y a plus d’indécidable ni plus rien à décider… Bref, c’est une ère neuve mais peu évangélique.
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Il me semble que les choses ne sont pas aussi tranchées. L’exemple que vous donnez, la GPA, pose de manière plus brûlante que jamais la question de la « vraie mère », et les tests ADN ne sont que la résolution légale des litiges, autrement dit l’exact contraire du jugement au sens de Salomon, ce qui n’empêche pas la question éthique, ou plutôt spirituelle, d’être plus d’actualité que jamais. Autre exemple : les décisions des juges de séparer un enfant d’une mère ou d’une famille dysfonctionnelle sont certes encore trop basées sur des critères traditionnels ou techniques, mais jadis cette question ne se posait même pas ; aujourd’hui, dans le cadre nécessairement restrictif de la loi, on peut voir des décisions qui privilégient l’amour pour l’enfant au détriment de l’instinct maternel, ou du droit pour une femme de « posséder » son enfant.
Michel Serres faisait remarquer, au moment du débat sur le mariage pour tous, qu’il était quand même étrange de défendre la famille traditionnelle avec pour principal argument la foi en un homme né de mère vierge et de papa « inconnu », l’enfant d’une « famille recomposée », en quelque sorte. Et donc je me demande si notre époque est si peu évangélique que cela.
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C’est, peut-être un sophisme dont M Serres était coutumier, quand il voulait se présenter à tout prix comme homme de son temps,
Mais ces (ses) faiblesses , par certains aspects sympathiques , n’enlèvent pas grand chose à son immense mérite .
Dans son Oeuvre la plus sincère je retiens les deux dernier livres: « Adichats » et « relire le relié » qui viennent en quelque sorte contredire cette affirmation un peu simplette.
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Ô comme je vous rejoins, et cela donne raison à Rimbaud, hélas, de préférer se taire que d’être entendu en ce sens si païen, à vouloir ainsi se substituer au créateur, sacrifiant d’emblée l’enfant à venir à son propre désir, la science en ce sens s’y soumettant par souci économique, ce qui rejoint ce que dénonce cette citation incroyablement polémique de Proust, que les théoriciens du genre se gardent bien de rappeler, alors qu’ils se sont inspirés du texte dont elle est tirée, et qui concentre toutes les imprécisions que ces sujets peuvent inspirer aux âmes malines :
« mais on a voulu provisoirement prévenir l’erreur funeste qui consisterait, de même qu’on a encouragé un mouvement sioniste, à créer un mouvement sodomiste et à rebâtir Sodome. »
https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Proust_-_%C3%80_la_recherche_du_temps_perdu_%C3%A9dition_1919_tome_9.djvu/48
On sera immanquablement discriminé à tenter, à l’heure où les plus discriminants sont les discriminés qui penseraient avoir légitimité à se venger à ce titre, d’établir la vérité.
Ce lieu ici est d’autant plus essentiel, où il est possible de tenter ensemble d’inventer ce langage du réel où seul le mensonge et le meurtre, ces enfants du malins, sont exclus, mais par eux-mêmes, la grande difficulté étant de continuer , même quand la parole est détournée comme vous le décrivez et comme Girard dans « je vois Satan… » décrit L’antéchrist, de ne pas céder à la tentation violente, de continuer à entendre la voix sainte :
« 42Jésus leur dit: Si Dieu était votre Père, vous m’aimeriez, car c’est de Dieu que je suis sorti et que je viens; je ne suis pas venu de moi-même, mais c’est lui qui m’a envoyé. 43Pourquoi ne comprenez-vous pas mon langage? Parce que vous ne pouvez écouter ma parole. 44Vous avez pour père le diable, et vous voulez accomplir les désirs de votre père. Il a été meurtrier dès le commencement, et il ne se tient pas dans la vérité, parce qu’il n’y a pas de vérité en lui. Lorsqu’il profère le mensonge, il parle de son propre fonds; car il est menteur et le père du mensonge. 45Et moi, parce que je dis la vérité, vous ne me croyez pas. 46Qui de vous me convaincra de péché? Si je dis la vérité, pourquoi ne me croyez-vous pas? 47Celui qui est de Dieu, écoute les paroles de Dieu; vous n’écoutez pas, parce que vous n’êtes pas de Dieu. »
https://saintebible.com/lsg/john/8.htm
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Merci de faire revivre ici cette discussion, dont je ne connaissais pas l’existence.
Pour moi qui ai découvert les travaux de René Girard tardivement, je m’attache avant tout à sa démarche scientifique.
Il a trouvé un « concept » anthropologique à l’aide d’une base de données indépendante du temps et de l’espace (Les œuvres littéraires des grands romanciers): Le désir mimétique. Ce concept a été validé par la découverte des neurones miroirs et a permis le développement d’une application de cette découverte avec les travaux du professeur Oughourlian. L’amour maternel ne peut prétendre à ce statut et ne peut être prééminent.
René Girard a analysé ensuite les mythes, de la même façon. Les histoires sont différentes mais cachent (ou révèlent) des faits… Salomon ne peut être le personnage principal, ce sont les deux femmes qui dévoilent les faits existants de sacrifices.
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Je pense, comme Hervé van Baren, que Salomon est bien comme l’a voulu la tradition, une « figura Christi ». Sa sagesse est vraiment « divine » parce qu’il connaît, comme le Christ, les mécanismes du désir, ce qui lui permet de les utiliser et d’en prévoir l’issue. Il agit en connaissance de cause, à la différence des lyncheurs ou des sacrificateurs qui « ne savent pas ce qu’ils font ». A eux deux, la vraie mère et le roi, préfigurent le Christ, le roi par sa « sagesse divine » et la mère par son amour infini.
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Votre réponse, Christine ORSINI, est très intéressante, car elle va permettre de mieux comprendre la pensée de René GIRARD, que vous connaissez bien que moi et la compréhension d’une recherche mimétique. Pour moi, la« figura Christi » (cf. Je vois tomber Satan comme l’éclair, notamment), le Christ dévoile le mécanisme du bouc émissaire et de son rôle dans le sacrifice, provoquant ainsi une rupture, le rendant ainsi inefficace. Il transforme le sacrifice en don de soi librement consenti.
La vraie mère provoque une rupture en sacrifiant, au lieu d’un enfant, son amour maternel. Elle ajoute à la rupture fondamentale crée par ABRAHAM, et si bien analysé par Michel SERRES, en ajoutant l’amour.
Pour moi, la connaissance des mécanismes du désir ne peut constituer à elle seule, une sagesse vraiment « divine ».
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Eh bien, cher Monsieur, René Girard n’a cessé pourtant de qualifier de « divine » cette sagesse, en protestant qu’il n’a rien inventé, il a trouvé le désir mimétique chez Cervantès, Proust et Dostoïevski et le mécanisme victimaire dans les récits bibliques, principalement dans les récits de la Passion. Voir « Les Choses cachées », pp 295 à 300, Livre de Poche. « Le fait qu’un savoir authentique de la violence et de ses œuvres soit enfermé dans les Évangiles ne peut pas être d’origine simplement humaine. » Maintenant, si vous voulez dire que la sagesse divine ne peut se limiter à la connaissance des mécanismes du désir (en somme à la théorie mimétique) et que donc Girard n’est pas Dieu, on sera bien d’accord avec vous !
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Quelle discussion passionnante !
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Chère Christine ORSINI, je suis entièrement d’accord avec votre dernière réponse. Il y a plusieurs parties dans la théorie mimétique et nous pouvons simplifier en séparant le désir mimétique, « concept » anthropologique que René GIRARD a trouvé à l’aide d’une base de données indépendante du temps et de l’espace (Les œuvres littéraires des grands romanciers dont Cervantès, Proust et Dostoïevski) et le mécanisme victimaire que René GIRARD a trouvé dans les récits bibliques, principalement dans les récits de la Passion. Et c’est la connaissance du mécanisme victimaire qui justifie la très belle citation de votre réponse : Effectivement « Le fait qu’un savoir authentique de la violence et de ses œuvres soit enfermé dans les Évangiles ne peut pas être d’origine simplement humaine. »
A partir du mythe du jugement de Salomon, car c’est bien un mythe, d’où on extrait le fait essentiel : La rivalité mimétique de deux femmes…, au moins deux interprétations sont possibles : Soit, selon Hervé VAN BAREN et vous, Salomon connait les deux concepts et possède la sagesse divine ; Soit, selon moi, Salomon connait « seulement » le concept du désir mimétique et possède « la sagesse qu’aucun homme, avant lui, n’a eu….. » mais ne connait pas le second, que seul Jésus connait et dévoilera « en provoquant une rupture » dans ce mécanisme.
Quelles sont les conséquences de ces deux interprétations? Si Salomon possède la sagesse divine, il connait, par avance, la réponse de la vraie mère et la provoque. Aucun libre arbitre, Dieu « manipule » et est sacrificateur….Bien sûr, je simplifie. Si Salomon ne la possède pas, la suite de son histoire (mythe) biblique se comprend mieux. Le mythe de son jugement le montre plus sage qu’il n’est, à l’égal de Dieu….Il peut donc sacrifier aux idoles (de ses femmes)…….
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Chère Christine ORSINI, je suis entièrement d’accord avec votre dernière réponse. Il y a plusieurs parties dans la théorie mimétique et nous pouvons simplifier en séparant le désir mimétique, « concept » anthropologique que René GIRARD a trouvé à l’aide d’une base de données indépendante du temps et de l’espace (Les œuvres littéraires des grands romanciers dont Cervantès, Proust et Dostoïevski) et le mécanisme victimaire que René GIRARD a trouvé dans les récits bibliques, principalement dans les récits de la Passion. Et c’est la connaissance du mécanisme victimaire qui justifie la très belle citation de votre réponse : Effectivement « Le fait qu’un savoir authentique de la violence et de ses œuvres soit enfermé dans les Évangiles ne peut pas être d’origine simplement humaine. »
A partir du mythe du jugement de Salomon, car c’est bien un mythe, d’où on extrait le fait essentiel : La rivalité mimétique de deux femmes…, au moins deux interprétations sont possibles : Soit, selon Hervé VAN BAREN et vous, Salomon connait les deux concepts et possède la sagesse divine ; Soit, selon moi, Salomon connait « seulement » le concept du désir mimétique et possède « la sagesse qu’aucun homme, avant lui, n’a eu….. » mais ne connait pas le second, que seul Jésus connait et dévoilera « en provoquant une rupture » dans ce mécanisme.
Quelles sont les conséquences de ces deux interprétations? Si Salomon possède la sagesse divine, il connait, par avance, la réponse de la vraie mère et la provoque. Aucun libre arbitre, Dieu « manipule » et est sacrificateur….Bien sûr, je simplifie. Si Salomon ne la possède pas, la suite de son histoire (mythe) biblique se comprend mieux. Le mythe de son jugement le montre plus sage qu’il n’est, à l’égal de Dieu….Il peut donc sacrifier aux idoles (de ses femmes)…….
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Je viens de voir votre commentaire dont je ne comprends pas tout à fait le sens. Laissez-moi juste vous répondre que pour René Girard, les récits bibliques ne sont pas des mythes. Un mythe est toujours raconté par les persécuteurs. L’inspiration biblique, au contraire dénonce ou révèle l’innocence de la victime. Merci de votre intérêt pour cette conversation.
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Je viens de voir votre commentaire, Christine ORSINI. Vous avez raison, mon emploi du mot mythe est ambigu. Les récits bibliques, effectivement, révèlent l’innocence de la victime. C’est la différence essentielle, découverte par René GIRARD. Mais c’est la seule différence. Le reste ressemble à un mythe et est donc romancé. Il faut donc l’interpréter, ce qu’a fait Girard, ce que Hervé VAN BAREN et vous avaient tenté, ce que j’ai essayé. Nos interprétations sont différentes, mais nous nous rejoignons sur l’essentiel.
Votre interprétation est intéressante. Vos réponses à d’autres de mes commentaires sur d’autres articles me font comprendre votre incompréhension, qui est peut-être un désaccord un peu plus important. De toutes façons, je vous remercie de vos commentaires stimulants.
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JLF Michel SERRES écrit bien dans Relire le relié que la question du mariage homosexuel a été réglée, il y a plus de 2000 ans,
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