
Chers amis,
Nos conférences reprennent et nous sommes heureux de vous annoncer les deux prochaines, qui auront lieu les lundi 6 et samedi 11 septembre.
Fidèles à la pensée de René Girard qui anime nos rencontres, nous n’hésiterons pas à faire un grand écart historique en évoquant à la fois le 40e anniversaire de l’abolition de la peine de mort en France, qui marque une étape essentielle dans la relève juridique d’un des derniers rituels sacrificiels du monde moderne – et, dans le cadre de notre cycle « Violence et représentation », en évoquant la constitution d’un des mythes de la modernité, à savoir la violence sociale du monde néolithique.
Ce sera pour nous l’occasion de saluer la mémoire de notre ami Roberto Calasso, grand écrivain et éditeur de René Girard aux Editions Adelphi, qui nous a quittés le 28 juillet dernier et dont l’œuvre tout entière est hantée par ces deux questions : du sacrifice, d’une part, et de ce qu’il appelait la « religion du social », de l’autre. Il reprochait en effet à l’auteur de La Violence et le sacré, qu’il connaissait mieux que quiconque, de parfois trop rabattre l’acte sacrificiel sur le plan de la société – alors que le sacrifice, selon ce spécialiste du monde védique, avait d’abord pour but de mettre les hommes en contact avec le surnaturel, c’est-à-dire avec un au-delà d’eux-mêmes.
Nous nous demanderons donc si, avec l’abolition de la peine de mort, ce n’est pas à une certaine forme de « religion civique » qu’a été mis un terme – et si ce n’est pas justement des ressources de l’art, mais d’un art conscient de ses racines rituelles, que nous avons plus que jamais besoin aujourd’hui.
Dans la joie de vous « sentir » nombreux à ces deux rendez-vous (puisque l’époque continue de nous coller à nos écrans d’ordinateurs), je vous dis toutes mes amitiés,
Benoît Chantre
Président de l’ARM
Le droit de faire mourir au XXIe siècle
Réflexions à l’occasion du 40e anniversaire de l’abolition de la peine de mort
Conférence de Denis Salas, magistrat
Lundi 6 septembre à 19h
Cette conférence voudrait renouveler l’approche traditionnelle de la peine de mort sous l’angle plus large du droit de faire mourir. À long terme, on observe un mouvement amorcé par Cesare Beccaria, fondateur du droit pénal moderne, à la fin du XVIIIe siècle, qui tend à l’abolition de cette peine au fur et à mesure que l’emprise de l’État monarchique s’affaiblit et que la société exige des peines plus utiles qu’effrayantes. À plus court terme cependant, la peine de mort subsiste et même se renforce dans les régimes à État fort alors que les djihadistes en ont fait une arme de propagande. Cette conjoncture incite les démocraties à radicaliser leurs réponses en usant du droit de faire mourir sous des formes nouvelles dans le cadre de la guerre contre le terrorisme.
La pensée de René Girard viendra à l’appui de notre réflexion, au cours de laquelle nous croiserons aussi celles de Michel Foucault et de Jacques Derrida.
>> INSCRIPTION (obtenir le lien zoom)
Denis Salas travaille sur les liens entre l’anthropologie de René Girard et le droit .
Vous trouverez sur le site de l’ARM un dossier « Droit et Théorie mimétique » avec l’intégralité du colloque organisé à la BnF en 2018 « Justice et terrorisme, entre mémoire victimaire et dépassement de la violence », dirigé par Benoît Chantre et Denis Salas, où étaient notamment invités Robert Badinter, Antoine Garapon, François Molins, Frédéric Worms…
Violence et néolithique : un mythe moderne ?
Conférence de Rémi Labrusse, professeur d’histoire de l’art contemporain (Université Paris Nanterre)
Samedi 11 septembre à 15h
Depuis son invention dans les années 1860, la notion de néolithique, par opposition au paléolithique, a été associée à l’idée de violence sociale. Simultanément, on a identifié et admiré ce qu’on pensait être les expressions matérielles d’un pouvoir gagné et assuré par la force : armes, constructions monumentales. Ainsi l’ancien étonnement devant les haches polies ou les mégalithes a-t-il nourri – à tort ou à raison –, à la fin du XIXe siècle, la pensée d’une « révolution néolithique », pensée destinée à se diffuser tout au long du xxe siècle et jusqu’aujourd’hui. Cette diffusion, cependant, ne s’est pas faite sans contradictions : non seulement, ses inflexions ont évolué mais, continûment, elles ont recelé des postulations opposées, projetant sur l’horizon dit « néolithique » l’attitude ambivalente de la modernité à son propre égard. À l’admiration pour l’essor spectaculaire de la puissance humaine n’a cessé de s’accoler l’inquiétude, sinon l’angoisse, sensible autant dans les réflexions théoriques des archéologues et penseurs de la préhistoire que dans un certain nombre de créations artistiques, notamment après la Seconde Guerre mondiale. Une énigme, en particulier, a saisi les imaginations : celle d’une brusque – ou supposée brusque – schématisation des images, allant de pair avec une accélération des conquêtes techniques. Qu’en est-il aujourd’hui de cette pensée moderne du néolithique ? En quoi et pourquoi se démarque-t-elle de ses premières formulations d’il y a un siècle et demi, tout en en étant fondamentalement tributaire ?
>> INSCRIPTION (obtenir le lien zoom)
Cette conférence fait partie du cycle « Violence et représentation », organisée par l’ARM en 2021.
En introduction à la conférence « Violence et néolithique : un mythe moderne ?« , nous vous invitons à consulter le dossier ARM « Anthropologie » où vous pourrez voir ou revoir les conférences de René Girard et de Benoît Chantre à propos du site néolithique de Catalhöyük, ainsi que celles de Roberto Calasso.
Chers tous, je suis navré d’apprendre la disparition de Roberto Colasso.
Je lis l’article ci-dessous ce soir-même ou au plus tard demain. Quant à la conférence annoncée, je sens qu’approche le temps où je serai redevenu capable de suivre celle-là et les autres.
Très proche de vous
Thierry
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