L’admiration, un sentiment qui nous fait grandir ?

Notre pratique de la théorie mimétique nous amène le plus souvent à la mobiliser pour comprendre des rapports humains de rivalité, en quelque sorte une de leurs faces sombres. Pourtant ces situations n’adviennent que lorsque la relation déraille. Dans beaucoup d’autres cas, le rapport humain n’est pas conflictuel. Il en va en particulier de l’admiration à distinguer au demeurant de la fascination ou de l’adoration comme nous y invite l’article de The Conversation France que nous diffusons aujourd’hui.

https://theconversation.com/ladmiration-un-sentiment-qui-nous-fait-grandir-229224

Asymétrique, l’admiration est a priori exempte de risque de confrontation violente. Elle est, comme suggéré dans l’article joint de Joëlle Zask [1], une condition de l’éducation et, plus largement, des apprentissages. Elle suggère une sorte d’admirations en chaîne qui tireraient tous ses maillons vers le haut.

Poussant un peu plus loin encore, nous avions ici vanté il y a plusieurs années les mérites que nous prêtions à l’admiration mutuelle [2].

Quoi qu’il en soit, nous avons là une matière à réflexion.


[1] Qui vient de publier un essai complet sur le sujet : http://www.premierparallele.fr/livre/admirer

[2] https://emissaire.blog/2020/07/18/vive-les-societes-dadmiration-mutuelle/

20 réflexions sur « L’admiration, un sentiment qui nous fait grandir ? »

  1. Je lis cet article et je me souviens qu’à la question : pourquoi plus tard, tu veux être »maîtresse » ? Zazie, le personnage de R. Queneau avait répondu :  » pour faire chier les mômes » ; toutes les petites-filles ne lui ressemblent pas ; il y en a qui veulent au contraire, sur le modèle de quelques enseignants admirables à tous égards, enseigner à leur tour et donc devenir admirables à tous égards. Elles veulent « faire grandir » les jeunes comme elles-mêmes ont su grandir. On ne sait pas très bien, à lire l’article et à écouter la philosophe, si l’admiration remplit dans d’autres domaines que l’enseignement cette fonction de courroie de transmission mais cette idée est néanmoins suggérée. C’est pourquoi traiter de l’admiration, c’est traiter de l’imitation : on ne « grandit » qu’en travaillant à devenir comme l’être admirable qu’on choisit comme modèle » modeste, capable d’attention, d’objectivité scientifique, de vigilance, d’étonnement et de curiosité« , les vertus « impliquées par le fait d’admirer« .

    Gabriel Tarde est cité comme le spécialiste de l’imitation qui a su voir la part d’invention qu’elle comporte. Ceci permet de bien séparer l’admiration de ce qui n’est pas elle : la fascination, l’adulation, l’idolâtrie. Cartésienne, la philosophe est adepte des « idées claires et distinctes », elle classe, établit des différences même si elle reconnaît qu’il y a parfois des mélanges : toutes les admirations ne sont pas exemptes de fascination.

    Mon sentiment, à lire et à écouter cet hommage vibrant à l’admiration est certainement mélangé aussi : comment ne pas être d’accord avec l’idée que toutes les relations entre les modèles et leurs disciples ne sont pas condamnées à être vécues dans la haine de l’autre et dans la haine de soi ? Par exemple, mes relations (très espacées, il est vrai) avec mon maître René Girard ne m’ont laissé que des images de bonheur. Mais, justement, comment ne pas être déçue par la simplicité et la platitude d’une analyse qui non seulement ne fait pas la différence entre la médiation interne et la médiation externe mais n’envisage même pas qu’une relation d’imitation puisse être un peu plus compliquée que « linéaire », par exemple triangulaire ?

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    1. Oui tu as tout à fait raison dans ta critique. Déjà Tarde plutôt que Girard mettait la puce à l’oreille. Mais peut-être cela résulte-t-il du choix de Girard d’avoir laissé largement de côté dans ses approfondissements de manière délibérée l’admiration mais aussi l’émulation dont je parlais il y a peu à propos des frères Lebrun. Une théorie de la mimésis bénéfique reste à faire. Je pense avec toi que son champ dépasse les apprentissages mais il est vrai que c’est sans doute en ce domaine que les bénéfices de l’admiration sont les plus manifestes.

      Une fois encore, merci d’avoir ajouté ton commentaire à ce qui n’était pour moi qu’un signalement d’article sur un sujet qui m’est cher et donc un éventuel support à commentaires.

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      1. J’ai une fois de plus conclu, en lisant cet article, que l’hommage que nous aimons rendre à René Girard pour ses analyses géniales,est complètement légitimé par des  » billets » non girardiens. Dire que j’aurais pu admirer n’importe qui faisant l’éloge des bons sentiments si je n’avais pas lu de bonne heure Mensonge romantique !

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  2. Luc-Laurent Salvador 11/09/2024 11:47

    Comme cela vient d’être dit, il me semble que cet article est intéressant – et méritait donc d’être porté à l’attention des girardiens – en ce qu’il révèle la platitude des connaissances actuelles en matière d’imitation dans le champ académique. Pour ce que j’en sais, au moins depuis l’avènement du darwinisme et de la psychologie, la valeur attribuée à ce concept ne cesse d’osciller en fonction des modes intellectuelles, c’est-à-dire, en fonction de cette nécessité d’apparaître original et à contre-courant qui meut les chercheurs plus ou moins soumis à l’injonction « publish or perish ». Après une bonne couche d’individualisme, on revient prudemment aux dynamiques collectives, histoire de sortir du lot mais pas trop, comme dans un banc de poissons (que les anglais traduisent si justement par « school of fish »).

    Mais comme il est exclu d’investir un territoire que l’on sait tôt ou tard voué aux gémonies, on se contente de gentilles déclarations de principes et de vœux pieux qui, pour sympathiques qu’ils soient a priori, contribuent à la trivialisation de l’imitation. Non seulement parce qu’ils ne l’éclairent nullement, mais surtout parce que la légèreté du propos entraîne une accumulation de petites erreurs qui contribuent à égarer les lecteurs. Ainsi, par exemple, il est faux de penser que Tarde a bien montré la part d’invention que contient toute imitation. Il y a là une tendancieuse dénaturation du propos de Tarde et même un complet renversement car son objectif premier était qu’on reconnaisse le fait que toute invention est intégralement basée sur des éléments d’origine mimétique qui, se trouvant agencés de manière nouvelle, constituent alors l’invention dont les prétentions à l’originalité doivent toujours être considérablement relativisées.

    Et que dire de l’empressement de l’auteure à écarter la hiérarchie et les distinctions sociales pour ensuite imposer comme une évidence l’idée qu’admirer c’est « considérer avec une grande attention l’objet ou l’action qui nous frappe par son caractère extraordinaire, c’est par exemple reconnaître le mérite hors du commun que nous attribuons à une personne. » ? Nous voilà bien loin de l’égalitarisme de bon aloi au sein duquel elle prétend confiner l’admiration !

    Bref, je ne connaissais pas la philosophie sociale et je ne jette pas la pierre à cette discipline mais disons que, pour le moment, je reste circonspect et attentiste quant à la valeur des fruits qu’elle porte.

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  3. Coïncidence, je regardais dernièrement la vidéo de la conférence de Benoît Chantre « Achever Clausewitz, 10 ans après », et je le cite : « il n’est pas d’admiration qui vire très vite en rivalité ». La médiation externe est toujours sujette à la force d’attraction qui la fait muter en médiation interne.

    Tout dépend de la distance. Dans le cas de Don Quichotte, aucun risque : Amadis de Gaule est mort depuis longtemps. Dans le cas du professeur et de son élève, la distance dépend largement d’un ordre conventionnel qui attribue à chacun sa place. Que cet ordre vacille et le risque de rivalité violente s’engouffre dans le vide créé. La prise de pouvoir des étudiants, dans certaines universités, qui censurent leurs professeurs, voire les poussent à la démission, est symptomatique de cet effacement des hiérarchies et de la violence qui en découle. Je me fais donc l’avocat du diable : cette belle admiration n’est possible que dans le strict respect de l’ordre sacré et de la place qu’il attribue à chacun·e. L’indifférenciation de la crise mimétique détruit cette nécessaire distance et condamne à la rivalité violente.

    Pour dépasser cette malédiction, je ne vois guère que la condition d’atteindre un niveau de conscience qui permette de dépasser aussi, volontairement, en toute connaissance de cause, le mimétisme envieux.

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    1. Je pense que l’affirmation de la dérive inévitable vers la rivalité est excessive si je puis me permettre cette réserve dans mon admiration… Il y a place pour les passions joyeuses, c’est aussi un une affaire de tempérament et pas seulement de circonstances. Prenons par exemple JM Oughourlian et P Dumouchel qui n’ont jamais me semble-t-il été tentés par la rivalité avec R Girard au contraire de JP Dupuy lorsqu’il a produit son essai sur La jalousie. Dans chacun des trois cas, nous sommes bien dans une relation maître à disciple de contemporains qui se connaissent mais les chemins ont été un peu différents. Et j’ajouterai que JP Dupuy garde probablement intacte son admiration à R Girard même s’il estime avoir amélioré voire dépassé le paradigme girardien.

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      1. Peut-être sommes-nous bien placés, dans le cercle des girardiens convaincus, pour nous rapprocher du niveau de conscience qui permet cet exploit ? Nous sommes bien informés. Girard lui-même reconnaissait la relation de rivalité avec Nietzsche, Freud et Levi-Strauss, et il s’en l’amusait… En effet, ça ne l’empêchait pas de les admirer. Être conscient de la rivalité mimétique, n’est-ce pas déjà un peu en sortir ?

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      2. Jean-Marc: je suis étonné de te voir mettre l’essai sur la jalousie de Dupuy sur le compte de la rivalité. Cela signifie-il que tout apport, tout perfectionnement de la théorie mimétique équivaudrait à entrer en rivalité avec Girard? Dans ce cas, quelle est la différence entre cette position et la position dogmatique? N’est-ce pas là le signe d’une sortie hors du cadre scientifique dans lequel Girard a voulu inscrire son hypothèse? Pour ma part, je considère l’essai de Dupuy comme un apport indispensable à la théorie mimétique, en ce sens qu’elle la complète harmonieusement là ou Girard avait fait preuve d’un moment de distraction sans doute. Car la figure du cercle, dans laquelle on est inclus ou exclus, introduite par Dupuy pour expliquer la jalousie, faisait déjà partie de l’hypothèse girardienne depuis le début.

        Hervé: quant à la figure de Freud, Girard avait reconnu avoir été injuste envers son « père spirituel » dans dccdfm notamment, ce qu’il m’avait expliqué par un « mécanisme de défense » (Freud comme modèle-obstacle). Il admirait Freud. Freud: modèle-obstacle qu’Oughourlian n’a pas su dépasser de son coté, à mon humble avis. Dupuy a peut-être connu ce genre de problème avec Rawls, mais à ma connaissance, pas avec Girard. Mais enfin, je ne suis pas là pour psychanalyser nos aînés et nos maîtres, et encore moins, quand le temps sera venu, pour blanchir quelques sépulcres….

        Benoit H

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      3. @ Benoît Hamot

        Si mon exemple est mal choisi, ce que j’admettais implicitement par l’ajout de ma dernière phrase, ta réponse ne fait que renforcer mon propos principal qui était que l’admiration ne dérivait pas inévitablement en rivalité.

        Pour ce qui concerne la compatibilité entre adjonction et admiration, je partage bien entendu ton point de vue.

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  4. « En amour, notre rival heureux, autant dire notre ennemi, est notre bienfaiteur. »

    https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Proust_-_Le_Temps_retrouv%C3%A9,_1927,_tome_2.djvu/58

    On ne dépasse pas le modèle, qui n’est pas Girard mais le Christ, seul à même de nous permettre de dépasser la jalousie, ou le désir mimétique, je n’ai jamais compris la différence que Dupuy y voyait, si ce n’est de vouloir dépasser son maitre, qui n’était pas le Christ.

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  5. Luc-Laurent Salvador 11/09/2024 21:37

    @ Benoît Hamot

    Il me semble que Jean-Marc Bourdin a très bien choisi son exemple. Lorsqu’il résume son approche « topologique » de la jalousie, Jean-Pierre Dupuy évoque rien moins que l’inanité du triangle mimétique et grosso modo le caractère superflu de la théorie mimétique dès lors qu’on adopterait son hypothèse. Bref, il n’y a aucune visée de complétion mais bien une visée de substitution. C’est dit à la marge, l’air de rien et ça n’en est pas moins ET recevable ET, partant, scientifique, tant il est vrai qu’au suivisme nul n’est tenu. Pour ma part, je salue ce genre d’audace même si, comme je l’ai dit par ailleurs, je pense sa démonstration non concluante, aussi séduisante et même convaincante qu’elle puisse sembler à certains moments.

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    1. Mr Salvador. Je n’ai pas lu cela chez Dupuy. Il y a 2 figures géométriques dans la TM: cercle et triangle, et si le cercle convient mieux à la jalousie, et je suis d’accord avec Dupuy sur ce point, mais cela ne remet pas du tout en question le triangle pour ce qui concerne le désir mimétique. Je vous invite à relire cet essai.

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      1. Je suis d’accord avec le commentaire de Luc-Laurent Salvador, pour plus de précision, même si ma lecture de « La jalousie » n’est pas récente.

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      2. Ce qui est mis en cause par Dupuy, c’est l’intégration de la jalousie dans la structure triangulaire du désir : « Ce qui fait de la jalousie une structure irréductible au désir mimétique, c’est qu’elle ne connait ni la médiation ni l’imitation[1] » Sa formulation semble effectivement erronée, dans la mesure où la jalousie concernerait le cas classique d’un couple dont l’un des partenaires se sent menacé, à tort ou à raison, par un rival qui lui ravirait l’objet de son désir. Girard a montré, me semble-t-il, et avec une grande pertinence, que le jaloux éprouvait en réalité le besoin de voir son objet désiré par un autre (modèle-obstacle) afin de pouvoir le désirer lui-même. On est clairement ici dans le cadre strict du désir triangulaire. Mais Dupuy parle d’autre chose, et sans doute faudrait-il trouver un autre terme que celui de « jalousie » ? Pour ma part, je n’en connais pas (toute suggestion est bienvenue !). Dupuy évoque en effet ces situations où l’on souffre de se voir exclus d’un cercle. Il parle de la souffrance du sujet « jaloux » vis-à-vis de ceux dont il pense qu’ils sont inclus dans le cercle. Ce n’est pas le cas d’un désir triangulaire perverti : ce qui est clairement celui de L’éternel mari (Dostoïevski). Précisément, ce mari ne souffre pas de la situation qu’il appelle de ses vœux, et qu’il a instaurée en vue d’étayer son désir, car bien au contraire : il en éprouve le besoin et il en jouit. C’est sans doute le cas de Dominique Pelicot, qui a atrocement soumis sa femme endormie au viol de ses « amis », et qui a filmé ces scènes. Or Dupuy parle seulement de la souffrance du sujet jaloux : ces deux situations sont donc très différentes. Le type de situations évoquées par Dupuy est particulièrement bien analysée dans le roman The Waves (Les Vagues) de Virginia Woolf, où les deux personnages principaux, Louis et Rhoda, expriment leur marginalité et leur jalousie vis-à-vis du groupe des collégiens réunis en cercle, autour de Perceval qui en constitue le centre. La configuration décrite par Dupuy y est particulièrement explicite, et la figure du cercle revient en permanence, par exemple dans les pensées de Rhoda qui doit rester seule dans la salle de classe pendant que les autres sont sortis dans la cour. Elle ne parvient pas à finir son exercice de maths : « Tiens ! La boucle de ce chiffre commence à se remplir peu à peu ; elle contient le monde. Je me mets à dessiner un dessin qui boucle le monde, mais je suis en dehors de la boucle. Je rapproche les deux extrémités de la boucle ; je la ferme ; je la parfais. Le monde est parfait, et je suis hors du monde. »  Il y aurait donc un malentendu, et peut-être est-ce parce que Dupuy a mal formulé son hypothèse ? Nous pouvons lui faire cette critique, mais certainement pas celle de mettre en question le triangle du désir. Je ne comprends pas ce procès d’intention, il est dû à une lecture superficielle de son remarquable essai, qui constitue, à mon avis, l’un des apports le plus important à la théorie mimétique.

        [1] (Dupuy, La jalousie. Une géométrie du désir 2016) p. 133

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  6. Pour Giuseppe Fornari, l’éducateur doit pouvoir répondre « au besoin le plus fort et le moins reconnu de l’homme, celui d’admirer et de suivre quelqu’un de toutes ses forces, le besoin littéralement d’adorer quelqu’un vu comme le dépositaire d’une supériorité divine, comme le dépositaire du ‘‘sens même de l’existence’’. »  Giuseppe FORNARI, Le marionette di Platone, La Spirale mimétique.

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  7. Moi, je suis seul et eux, ils sont tous…

    Chacun se croit exclu du cercle, victime alors d’une illusion d’autonomie qui se pense à la place du médiateur.

    Orgueil, quand tu nous tient : chacun se croit seul en enfer, et c’est cela l’enfer.

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  8. https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/esprit-de-justice/comment-penser-une-justice-non-sacrificielle-6081946

    Une réflexion après l’écoute impatiente de la parole qui ne saurait se vendre d’être inestimable, et qui n’a pas prononcé la seule notion de son étymologie hébreue, le lâcher-prise de la victime, seul à même de briser le cercle des vengeances pour donner à l’imagination la capacité de penser la mission de l’institution comme créatrice des conditions du pardon quand l’irréparable est accompli, et qu’il s’agit de ne pas le reproduire.

    La parole alors ne se vend plus, cher Hervé, mais se partage et ouvre à tous l’enceinte protégée qui permet d’accéder à l’embouchure de toutes les potentialités du cœur humain, à l’image de l’exemple ineffable qui nous en a indiqué la réalité.

    Amoureuse salutation

    Ô mes deux intimes, détournez votre chemin

    En passant par la dune!

    Chevauchez votre monture jusqu’à la halte de La’la

    Et aspirez aux eaux de Yalamlam.

    Près d’elle, ceux que tu as connus ;

    Et ceux à qui appartiennent

    Mon jeûne, mon pèlerinage, ma visite

    Et ma fête solennelle aux lieux saints.

    Que jamais je n’oublie le jour où, à Minâ,

    Les cailloux sont lancés, ni les choses d’importance,

    Près du suprême autel sacrificiel,

    Ni près de la source de Zamzam.

    Là où ils lancent les pierres

    Demeure mon cœur, lancé contre les stèles,

    Mon âme, là où ils sacrifient

    Mon sang, là où ils s’abreuvent.

    Ô chantre conducteur de chameaux !

    Si tu viens à Hâjir,

    Arrête un moment les montures

    Et transmets le salut !

    Adresse aux tentes pourpres,

    Aux abords de l’enceinte sacrée,

    La salutation de l’amant

    Qui soupire vers vous, esclave du désir.

    S’ils adressent le salut

    Rends-le avec le zéphyr oriental.

    Et s’ils se taisent,

    Bâte les montures et avance

    Jusqu’au fleuve de Jésus

    Là où leurs montures font halte,

    Et là où les tentes blanches,

    Près de l’embouchure, sont plantées.

    Invoque Da’d,

    Ar-Rabâb, Zaynab,

    Hind, Salmâ et Lubnâ

    Et fredonne telle une source !

    Demande-leur : al-Halba est-elle la demeure

    De cette jeune fille au corps souple?

    Elle qui te laisse voir l’éclat du soleil

    Au moment même où elle sourit.

    Ibn’Arabi, L’Interprète des Désirs.

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