Hitchcock, Girard et la téléologie

La signature du cinéaste anglais cache une vertigineuse question. La confrontation du « suspens » (1) cinématographique avec la vision girardienne permet de révéler cette question et de la formuler en toute clarté. Ce billet sollicite humblement votre aide pour y porter réponse.

Alfred Hitchcock expliquait la différence entre surprise et suspens de la façon suivante : « L’écran montre pendant deux minutes quatre personnes en train de jouer aux cartes. Soudain, surprise, une explosion se produit. Bilan : le spectateur s’ennuie pendant deux minutes et éprouve une demi-seconde de sensations fortes. Mais si préalablement, un plan de coupe a permis au spectateur d’apprendre qu’une bombe à retardement est accrochée sous la table de jeu, le bilan est complètement différent : pendant deux minutes, le spectateur est captivité par l’attente de ce qui va se produire. » Cette conception, dont les brillantes réalisations émaillent ses films, a valu à Hitchcock le titre de « Maître du Suspens ».

 Je suis un véritable admirateur du cinéaste et je me délecte régulièrement de la plupart de ses films. C’est pourquoi il m’est particulièrement pénible d’avancer le constat suivant : son « concept » de « suspens » est à classer dans la même catégorie que l’invention de  l’eau chaude ou du fil à couper le beurre. En effet, sa description n’est rien d’autre que la bonne vieille structure téléologique : annonce d’un événement ; attente avec épisodes ; événement en relation avec l’annonce. L’événement peut être souhaitable ou non, l’attente plus ou moins longue ; l’événement peut confirmer l’annonce, ou apporter une surprise.  Ce qui compte, et c’est le propre de la structure téléologique, c’est que le déroulement du présent est orienté par une fin située dans l’avenir.

Cette structure ne joue ce rôle d’orientation qu’à la condition de recéler un élément d’incertitude : nous ignorons soit le « quoi » (que va-t-il se produire ?), soit le « qui » (qui va remporter le match ?), soit le « quand » (à quelle heure les enfants vont-ils finir par rentrer ?), soit le « où » (le lieu du choc de la prochaine météorite géante), etc.

Sans élément d’incertitude, plus de suspens, plus de structure téléologique. « J’ai rendez-vous le 23 septembre 20** chez l’orthodontiste, à la clinique des Palmiers » n’est pas une structure téléologique (sauf lancinantes douleurs dentaires).

La structure téléologique est omniprésente. Le bridge en est un exemple : séquence d’annonces, puis jeu de la carte et enfin, échec ou réalisation du contrat. En musique, la « forme sonate » tire son efficacité de l’attente du retour de la mélodie initiale dans la tonalité principale. Le succès planétaire du football est une autre illustration : des actions essentiellement ennuyeuses sont suivies avec passion grâce à la promesse d’au moins un but avant le terme de quatre-vingt dix minutes.

Quand et comment la guerre en Ukraine se terminera-t-elle ? Question qui permet à telle chaîne d’informations en continu de tenir l’antenne plusieurs heures chaque jour. Ou encore le réchauffement climatique : à l’annonce par Al Gore de la disparition de la banquise en 2013 a succédé la perspective d’une hausse moyenne de la température terrestre supérieure à deux degrés en 2035. De fait, cette perspective oriente nos existences, tant d’un point de vue collectif (fermeture des centrales nucléaires) qu’individuel (avez-vous correctement trié vos déchets ce matin ?).

Enfin, dans un registre encore plus large, Baltasar Gracian résume la chose de façon saisissante : « … Dieu (…) tient tous les hommes en suspens » (2).

Bref, le suspens a tout d’une constante anthropologique. Et de cette observation jaillit immédiatement la question de ses liens avec la théorie mimétique : s’agit-il de deux structures fondamentalement différentes ou de deux angles de vue d’un même phénomène ?

A vrai dire, la citation complète de Baltasar Gracian nous pousserait à conclure : « Il nous faut donc imiter Dieu, qui tient tous les hommes en suspens ».

Mais n’allons pas trop vite. En bonne et saine logique, pour établir l’équivalence de deux concepts, il suffit de montrer que l’un implique l’autre et réciproquement. Ou que chacun des deux englobe l’autre.

Voyons ce que cela donne entre le système Girard et la structure téléologique.

Dans un sens, la réponse paraît évidente : le système Girard engendre une téléologie. Nous ne savons quoi désirer, nous sommes donc exempts de schéma téléologique, nous ne savons à quelle fin nous vouer. Un médiateur vient nous proposer un objet de désir (la victoire du XV de France à la Coupe du monde de rugby, l’ambition de faire fortune, la volonté de sauver la planète, etc.) Ce désir, que nous lui devons, instille en nous une structure téléologique, puisque nous allons organiser notre existence en fonction de la finalité vers laquelle ce désir se polarise. L’incertitude inhérente au schéma téléologique est bien là, puisque nous savons pas si, ni comment, notre désir obtiendra son accomplissement. La vision girardienne implique donc bien une téléologie ; en d’autres termes, elle fait partie du schéma téléologique.

Dans l’autre sens, la question est bien plus épineuse : un schéma téléologique implique-t-il nécessairement une structure girardienne ? Reformulons cette question avec le critère majeur  de girardicité : un schéma téléologique contient-il obligatoirement un médiateur ?

Si nous trouvons un exemple de schéma téléologique exempt de médiateur, la question est réglée : le schéma téléologique engloberait la théorie mimétique, et pas l’inverse, la vision girardienne ne serait qu’un sous-ensemble du schéma téléologique.

Il est facile de citer des exemples de systèmes téléologiques adossés à un médiateur : les prophètes et Jésus dans le christianisme ; le calendrier maya pour la fin des temps le 21 décembre 2012 ; Marx et l’avènement d’une irénique société sans classe ; le GIEC et ses annonces de catastrophes climatiques, etc.

Mais multiplicité des exemples ne vaut pas démonstration.

C’est pourquoi, chère lectrice, cher lecteur, j’en appelle à votre intervention, soit pour trouver un cas de schéma téléologique exempt de médiateur, soit pour proposer un processus de démonstration comme quoi le système Girard n’est pas seulement une partie de la structure téléologique, mais lui est réellement homéomorphe.

Faute de pouvoir en apporter la preuve, je conserve quant à moi cette dernière thèse à titre de conjecture ; ou, pour dire la chose autrement, je laisse la question… en suspens.

*****

Quel est l’intérêt de cette thèse de l’analogie entre structure téléologique et système Girard ?

Il est en premier lieu de nature théorique : c’est le fondement même de la connaissance que de discerner l’identité de phénomènes dont les manifestations sont apparemment différentes.

En second lieu, cette analogie présente un intérêt pratique. Chaque fois que nous engageons un projet ou nous y associons, nous nous inscrivons, et avec d’autres, dans un schéma téléologique. Si notre conjecture est juste, nous sommes donc aussi dans un schéma girardien, ce qui entraîne une conséquence des plus notables : quelle que soit la pureté d’intention de notre projet et sa bienfaisance, il recèlera toujours de possibles rivalités, de possibles exacerbations de ces rivalités jusqu’à des crises, voire la désignation et peut-être le lynchage de boucs émissaires. Combien de grandes perspectives collectives, toutes de générosité et de sens de la justice, se sont concrétisées en processus de persécutions, exerçant une grande violence et laissant derrière elles de nombreuses victimes !

Tout projet, même le plus bienveillant, porte en lui la possibilité de tourner au mécanisme sacrificiel. Peut-être qu’en garder conscience nous aiderait à déployer nos projets en intégrant, dès le départ, des dispositions propres à éviter ou amoindrir le versant néfaste du mimétisme.

Une autre question est encore ouverte par cette conjecture de l’analogie entre vision girardienne et structure téléologique. La vision girardienne a précisé l’opposition entre le temps préchrétien et celui inauguré par le christianisme. Le temps préchrétien est cyclique, il est rythmé par « l’éternel retour » de la crise sacrificielle. Le temps du christianisme est téléologique, c’est l’avènement du royaume de Dieu et de la fin des temps.

Cette opposition suggère que le temps préchrétien n’est pas téléologique. C’est effectivement vrai « vu de l’extérieur » puisque, dans la pensée archaïque, l’ordre cosmique se perpétue. Mais du point de vue qui importe, celui des êtres vivants, inscrits dans le temps, il me semble que le temps cyclique est plutôt lui aussi de nature téléologique ; simplement, ce qui crée le « suspens » n’est pas l’avènement du royaume de Dieu, mais la survenue de la prochaine crise mimétique. Preuve en est l’instauration des rites et des tabous : ils ne s’expliquent que si la communauté redoute une nouvelle occurrence de la crise ; redouter, c’est s’attendre à. Et s’attendre à quelque chose, c’est le propre de la structure téléologique.

*****

Voilà donc résumées quelques (bonnes ?) raisons de consacrer du temps à établir la conjecture de similitude entre système Girard et structure téléologique. Merci à qui s’y engagera.

(1) Je reste fidèle à la prononciation française classique « suspan » et réprouve l’anglomaniaque « sœuspainse », prononciation d’autant plus absurde qu’il s’agit d’un mot français.

(2) Baltasar Gracian, Oraculo manual y arte de prudencia, 1647, maxime numéro III (traduction de Nicolas Amelot de la Houssaie, excellente, sauf le titre, fort mal venu, « L’Homme de cour »).

35 réflexions sur « Hitchcock, Girard et la téléologie »

  1. Cher Jean-Louis,

    Il me semble que tout ce qui est incertain et s’inscrit dans une durée relève de ce que tu nommes téléologie. Dès lors, je me demande si la théorie mimétique est spécifique de ce point de vue. Si elle l’est, c’est dans sa finalité de révélation (ou d’apocalypse). En cela elle s’oppose en quelque sorte au temps du projet théorisé par Jean-Pierre Dupuy qui relève plutôt du katechon (c’est du moins ainsi que je comprends son catastrophisme éclairé). Mais les deux options sont finalistes.
    Plus largement, je pense que tout idéalisme, politique ou religieux, soit encore tout manichéisme accordant une valeur supérieure à un bien postulé, est un finalisme (ou une téléologie).
    En élargissant la focale, même le relativisme le plus pragmatique soucieux du mieux plutôt que d’un Bien laisse à ses adeptes la faculté de tenter d’accomplir leurs désirs et de mener leurs entreprises à leurs fins.
    Pour moi, la pensée girardienne se reconnaît dans un idéalisme religieux et ne fait pas mystère de son rejet du relativisme. Sa finalité (son Bien) consiste en l’avènement d’une humanité débarrassée de sa violence sans recours au sacrifice ni à ses succédanés institutionnels. Assez logiquement, elle emprunte aux attentes millénaristes et messianiques qui se manifestent ici et là de temps à autres. Sa fin est une Révélation ultime salvifique, celle promise par les petites apocalypses des synoptiques. « Quand ces choses commenceront » est le titre donné par René Girard à son livre d’entretiens avec Michel Tréguer paru en 1996.
    Evidemment, je ne réponds pas à ton défi de trouver un contre-exemple, mais je prétends que toute vie d’un organisme mortel relève du suspens, qu’il en ait conscience ou non. Pour en revenir à Marc (13:32) : « Quant à ce jour et à cette heure-là, nul ne les connaît, pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils, mais seulement le Père. » Existe-t-il plus grand maître du suspens ?

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  2. Je trouve la question de Jean-Louis trapue mais je ne suis pas d’accord avec la façon qu’a Jean-Marc de s’en sortir. Il dit que « toute vie d’un organisme mortel » relève du « suspense ». Je regarde mon chien dormir, courir, manger, mener sa « vie de chien », si mal nommée quand il s’agit de la sienne ( certains humains ont des vies de chien, certes, mais pas mon animal, du moins au sens qu’on donne à cette expression). Comme l’a bien spécifié Hitchcock, c’est l’attente angoissée d’un événement qu’on sait devoir arriver, qu’on s’attend à voir arriver d’un instant à l’autre, qui relève du suspense. Il faut donc être conscient, fortement conscient que cet événement, généralement une catastrophe, est programmé et inévitable sauf miracle ; et il y a pas mal de miracles chez Hitchcock : le spectateur lui est la plupart du temps reconnaissant d’avoir eu peur pour rien. Or, mon chien n’a aucune conscience, apparemment, qu’il va mourir et, au fond, moi non plus, du fait précisément que nous ne connaissons ni le jour ni l’heure. Bon, je vais remettre à demain la réflexion que demande le texte de Jean-Louis, très sophistiqué sur le plan philosophique. Ah, ces ingénieurs….

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    1. Je pense que Jean-Louis opère un glissement entre suspens hitchcokien (organisé et manipulé par le scénariste ou réalisateur) et téléologie girardienne. Je me suis situé dans le deuxième cas de figure pour étendre l’idée à tout le monde vivant. J’avais pris la précaution de préciser « qu’il en ait conscience ou non », peut-être en pensant par anticipation à l’objection de ton chien. Pour lui, croquettes ou viande fraîche à l’heure de manger, caresse prodiguée ou « couché » asséné d’une voix exigeante… Conscient ou pas, nul ne connaît ni le jour, ni l’heure, ni ce qui adviendra.

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      1. En relisant attentivement le billet de Jean-Louis Salasc, je suis complètement d’accord avec toi, Jean-Marc, il y a bien un glissement de sens entre le « suspense » hitchcockien et la structure téléologique. Il n’est pas question de nier que le présent (du spectateur) est tout entier orienté vers l’avenir (une fin terrible que lui seul peut pré-voir sans pouvoir l’empêcher). Mais la véritable structure téléologique appartient au scénariste qui aurait mijoté, par exemple, une vengeance entre mafieux. Et pour que ce soit hitchcockien, il faudrait qu’à la table destinée à voler en éclats, figure un personnage attachant, sinon, le suspens perdrait de son intensité.

        De même que Girard a inventé le concept de « désir mimétique », alors même que l’imitation des désirs est une chose ordinaire exploitée entre autres par la publicité ; de même Hitchcock a inventé le « suspense » au cinéma, alors même que la chose existait déjà dans la vie et même dans le spectacle : je pense aux cris effroyables des enfants avertissant Guignol, face à eux, et qui ne voit pas qu’un méchant ou un gendarme armé d’un gros bâton va l’assommer.

        Il me semble qu’au bridge ou dans un stade de foot, il peut y avoir une attente anxieuse, l’avenir n’est pas prévisible, mais d’une part le résultat dépend beaucoup des joueurs, d’autre part, sauf en cas de fraude, il n’existe pas un « spectateur » plus averti que les autres, qui connaitrait, si je puis dire, le dessous des cartes et aurait un temps d’avance sur les participants. Le génie d’Hitchcock est de l’avoir inventé.

        Maintenant, la question posée par ce billet est de plus grande ampleur (métaphysique) que la question de savoir si Hitchcock est génial. J’ai conscience d’avoir traité une question secondaire, à ma portée.
        Cependant, ce « spectateur » qui aurait une longueur d’avance sur les personnages d’un film et qui voudrait les alerter, les sortir de leur aveuglement, les sauver en quelque sorte, n’est-ce pas une image que nous pouvons nous faire non seulement du prophète mais aussi de l’exégète biblique, par exemple « girardien » ? A cette différence près que la fin de l’histoire, aux deux sens du mot « fin », n’est pas écrite ni les rôles distribués.

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  3. As-tu remarqué, cher Jean-Louis, la quasi-homonymie entre « téléologie » et « théologie » ? Pour aborder ta question, permets-moi de lier les deux (sans pour autant prétendre apporter une réponse définitive).
    En faisant un détour par un film, puisque nous aimons tous deux cet art. Dans « Le silence des agneaux », le réalisateur nous piège en nous faisant croire, par sa narration visuelle, que le FBI va arrêter le tueur à son domicile. Suspens insoutenable. Plan large sur les agents qui encerclent la maison. Plan sur le faux livreur de pizza qui sonne à la porte ; plan sur le tueur qui ouvre et se trouve face-à-face avec… Clarice, la jeune stagiaire. Ce n’était pas la bonne maison… Magistrale scène, que n’aurait pas reniée Alfred. La finalité annoncée – l’arrestation du tueur par le FBI – est brutalement remplacée par une autre réalité : Clarice vient de se jeter dans la gueule du loup. Tu précises bien dans ton introduction qu’il peut y avoir, à la fin, un effet de surprise. Mais nous sommes ici dans un autre cas de figure : l’événement réel n’est pas celui qui a été annoncé. Nous ne pouvons être influencés que par l’événement annoncé, autrement dit la véritable finalité n’a pas d’influence sur notre comportement, puisqu’elle nous est invisible.
    La téléologie chrétienne traditionnelle, la Parousie déclenchée au moment voulu par Dieu, et conduisant au jugement des morts et (éventuellement) au paradis, est fortement ébranlée par l’interprétation girardienne de l’apocalypse : une révélation de notre violence, et en particulier de l’omniprésence du mécanisme victimaire, qui conduit à une conversion ou, pour reprendre tes fondamentaux, à se libérer de l’emprise des médiateurs.
    Du point de vue théologique, cela pourrait s’énoncer comme suit :
    – La véritable révélation nous a été dissimulée par les prophètes (révéler sans révéler, Isaïe 6 et ses multiples répliques). Autrement dit, la finalité ne nous est pas connue (seulement sa version mythologique), jusqu’à ce qu’elle advienne (jusqu’à ce que Girard nous la désigne).
    – Il en découle que le processus apocalyptique réel se déroule sans interférence avec la marche du monde (puisque sa finalité réelle nous est inconnue). On sort du schéma téléologique classique.
    – Le processus est incertain dans son déroulé, mais certain dans sa finalité : cette révélation doit advenir à un moment ou un autre, et ses conséquences apocalyptiques aussi.
    – Mais le plus significatif, me semble-t-il, est que cette finalité consiste précisément à nous affranchir du mimétisme rivalitaire, autrement dit de toute médiation interne.
    Si elle n’était pas trop rapide et trop courte, cette analyse pourrait nous amener à conclure que la théorie mimétique englobe le schéma téléologique classique, qui n’est qu’un sous-schéma puisqu’il ne prend pas en compte le cas d’une annonce dissimulée. On pourrait rétorquer que l’inverse est vrai aussi, puisqu’il existe la possibilité d’une finalité qui contredit le schéma girardien ; mais ce serait oublier que cette abolition du schéma élémentaire de la théorie mimétique fait partie de celle-ci. Je pense que ton axiome (schéma girardien = présence d’un médiateur) est trop restrictif !

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  4. Le temps poétique, tel que le conçoit T.S. Eliot, échappe peut-être à toute forme de suspens, et de suspense.

    FOUR QUARTETS

    LITTLE GIDDING

    Partie V

    Ce que nous nommons le commencement est souvent la fin
    Faire une fin c’est commencer.
    La fin est là d’où nous partons.

    Chaque phrase ou proposition, donc, est fin et commencement.
    Chaque poème une épitaphe. Et toute action
    Est un pas fait vers l’échafaud, le feu, le gosier de la mer
    Ou vers une pierre illisible ; et c’est de là que nous partons.
    Nous mourons avec les mourants :
    Voyez-les s’en aller et, avec eux, nous-mêmes.
    Nous naissons avec les défunts :
    Voyez-les revenir et, avec eux, nous-mêmes.

    Nous ne cesserons pas notre exploration
    Et le terme de notre quête
    Sera d’arriver là d’où nous étions partis
    Et de savoir le lieu pour la première fois.

    Et toute chose sera bien
    Toute manière de chose sera bien
    Lorsque les langues flamboyantes
    S’infléchiront dans la couronne
    Du nœud ardent et que le feu
    Et la rose ne feront qu’un.

    Alain

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  5. Cher Jean-Louis, je crois qu’après avoir bien réfléchi à votre question, j’aurai du mal à y répondre. Parce que j’ai envie de contester votre proposition selon laquelle « le système Girard engendre une téléologie ». Une téléologie, c’est une explication des choses non par les causes qui les produisent mais par la fin en vue de laquelle elles sont produites. Pour rire, « le melon est découpé en tranches pour être mangé en famille » ou plus sérieusement : « l’œil est agencé pour la vision ».
    Faute de place pour expliquer pourquoi les sciences, même les sciences dites humaines, répugnent à utiliser votre structure téléologique, je dirai seulement que si pour Aristote, « le monde est suspendu à Dieu » (belle formule qui colle à votre propos), pour les Modernes, la rupture est totale entre Science et Théologie. La théologie, comme le dit justement Hervé, est mariée avec la téléologie, le raisonnement à partir d’un projet. Même Voltaire a eu besoin d’un Horloger pour construire son horloge (l’univers réglé comme une horloge).
    Mais la rupture est totale : les causes finales relèvent seulement du projet humain, qui se fixe des buts à atteindre..
    Girard prend le parti de la science, il construit l’ hypothèse du « mécanisme victimaire », produit du hasard et de la nécessité, pour rendre compte de la genèse des cultures et de l’humain. A l’origine de ce mécanisme, il y a le désir humain, qui est sans sujet ni objet, sans origine ni fin, qui est mimétique.
    Alors, est-ce que Girard, avec le « médiateur » fait entrer par la fenêtre la structure téléologique mise à la porte de son anthropologie ? Il me semble que non : dans la TM, les causes finales, même en ce qui concerne l’action humaine, n’appartiennent à personne et restent le produit du hasard et de la nécessité. Même si, comme vous dites, les systèmes téléologiques se sont adossés à un médiateur, les foules modernes et les individus qui les composent, y compris leurs soi-disant « influenceurs » relèvent de la médiation interne et tout le monde influence tout le monde.
    Par contre, s’il y a bien un mécanisme de la « montée aux extrêmes », dans la TM, la Révélation qui est en marche et ses conséquences apocalyptiques rendent les hommes entièrement responsables de la fin de leur histoire, aux deux sens du mot « fin ».

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    1. Bonjour chère Christine,
      merci de vos commentaires et de l’intérêt que vous manifestez pour ce billet, même si vous rejetez la conjecture que j’y propose ; rien de tel qu’une petite joute amicale avant la torpeur que nous promet la trêve des confiseurs !
      Vous ne concédez même pas l’un des deux termes de la réflexion, à savoir que le désir (forcémemnt mimétique, en bons girardiens que nous sommes) engendre une structure téléologique. Je me suis demandé pourquoi. Voilà ce que je comprends, vous me direz si je me fourvoie.
      Il s’agit de soutenir la valeur scientifique du travail de Girard. Or la pensée scientifique rejette toute idée de structure téléologique. Il est donc exclu que le système Girard ait quoi que ce soit à voir avec la structure téléologique : une telle accointance poterait un coup fatal à la reconnaissance de la valeur scientifique des conceptions girardiennes.
      Il existe cependant une échappatoire à ce syllogisme implacable.
      En effet, celui-ci présuppose que la pensée scientifique est incompatible avec toute structure téléologique. Il me semble cependant que ce point de vue est contestable ; c’est Claude Tresmontant qui a donné les arguments de cette contestation. Les voici en résumé.
      L’esprit humain n’a (pour le moment) émis que quatre hypothèses face à l’existence de l’univers ordonné. L’hypothèse monothéiste (l’univers est engendré par une force créatrice extérieure à lui) ; l’hypothèse animiste, avec ses avatars un peu plus élaborés des panthéons archaïques (il y a de la force créatrice éparpillé partout comme de la poudre de perlimpinpin) ; l’hypothèse spinoziste (la force créatrice est l’univers lui-même, « Deus, sive natura ») ; l’hypothèse athéiste : il n’ y a pas de force créatrice, l’ordre de l’univers résulte d’une suite de hasards.
      Cette quatrième hypothèse est aujourd’hui dominante dans les milieux scientifiques et philosophiques des sociétés occidentales ; elle est même considérée comme une vérité, établie par la connaissance scientifique. Or selon Tresmontant, ce n’est pas le cas. L’hypothèse d’un univers ordonné par le hasard exige un univers incréé et éternel (ne serait-ce que pour que les occurrences « ordonnatrices » du hasard aient le temps de se produire) ; mais nous savons que l’univers n’est pas incréé (le Big Bang) et qu’il n’est pas éternel (c’est la Loi de Carnot, l’énergie se dissipe, le soleil s’éteindra, l’univers disparaîtra, etc.)
      Voilà qui ramènerait la thèse athéiste au rang d’une hypothèse : ce qui nous libère de l’obligation d’expulser la téléologie, puisque des quatre hypothèses, seule celle de l’athéisme est réellement incompatible avec elle.
      En se plaçant de ce point de vue, il donc parfaitement possible de considérer que le système Girard est à la fois homéomorphe à une téléologie et constitue une connaissance de nature scientifique.

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      1. Cher Jean-Louis, c’est moi qui vous remercie : je suis flattée que vous preniez la peine de me répondre et en effet, admirative de votre logique d’ingénieur, telle qu’elle s’exprime dans votre billet et dans l’objection que vous faites à ma « position » face à la téléologie en général et à la téléologie girardienne en particulier.
        Oui, vous avez raison, la TM est une théorie scientifique et comme telle, elle ne peut être soupçonnée de finalisme que par des esprits malveillants. Mais comme l’idée de vous compter parmi ces esprits malveillants est très loin de moi, je pense que l’enjeu de notre désaccord ou de notre débat n’est pas là.

        J’ai lu Tresmontant dans ma jeunesse, il y a donc un certain temps mais je me souviens d’avoir comme vous apprécié la critique, au nom des « progrès de la science », de l’évidence de la thèse athéiste. Même Darwin, qui prétend se passer de la structure téléologique pour expliquer l’évolution, qui ramène toutes les organisations complexes à la « sélection naturelle », qui est amené par là à faire précéder la vision des multiples hasards qui ont permis à l’œil de se former et de voir (on n’a pas des yeux pour voir mais on voit parce qu’on a des yeux) reconnaît qu’il ne faut pas être pressé pour que tous ces phénomènes finissent par se produire. Il faut avoir l’éternité devant soi, ce qui n’est pas le cas.

        Mais plus modestement, je ne me suis pas attaquée au problème de l’existence de Dieu mais à celui d’une structure téléologique girardienne. Vous reconnaissez que le désir mimétique, parce qu’il est sans sujet ni objet, n’est orienté naturellement vers aucune « fin », ni vers un bien quelconque ni vers le Bien, comme l’Eros de Platon. Le désir selon Girard a besoin de « modèles » pour s’orienter, pour se donner des fins. Selon vous, c’est donc la médiation d’un modèle à imiter qui donne à l’anthropologie girardienne sa structure téléologique et qui pourrait bien être la pièce maîtresse de toute forme de téléologie. D’où la parenté, pas seulement homonymique entre théologie et téléologie. Max Scheler : « L’homme possède ou un Dieu ou une idole ».

        Au fond, est-ce que je conteste cela ? Pas vraiment. J’ai contesté votre proposition au nom du règne dans les sociétés modernes de la « médiation interne », vous savez cette imitation de tous par tous dont nous voyons aujourd’hui la possible analogie avec la « guerre de tous contre tous » de Thomas Hobbes. Et dans ce cas de figure, les buts poursuivis ou les causes finales ne semblent plus en mesure de donner un sens ou une direction à l’action humaine, c’est ce que Girard appelle une « crise sacrificielle », un moment d’indifférenciation ou de violence qui fait disparaître toutes les intentions, bonnes ou mauvaises pour n’exposer que leurs résultats de destruction et de mort. Je me suis sans doute laissée influencer par l’actualité des tragédies en cours. Mais je tiens que la TM est plus « apocalyptique » que « téléologique » : tout est révélé mais rien n’est accompli.

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      2. Il me semble que pour soutenir l’incompatibilité entre toute structure téléologique et la pensée scientifique, il faudrait que cette dernière soit en mesure d’expliquer l’émergence de systèmes complexes (les atomes, les molécules, la vie, l’esprit) à partir du chaos ambiant, or nous n’en sommes qu’aux balbutiements de cette compréhension. La complexité semble violer la seconde loi de la thermodynamique (le désordre est condamné à croître dans un système fermé), et personne n’est en mesure, à ce jour, de proposer une ou des lois fondamentales de la complexité. Quel rapport avec Girard ? Girard démontre que le mimétisme nous fait sortir de l’hypothèse cartésienne de l’individu pensant ; nous ne sommes pas pensants/conscients individuellement, mais au sein d’un réseau d’individus interconnectés. Autrement dit, la théorie mimétique découvre un nouveau niveau de complexité, la communauté humaine, supérieur aux parties qui la composent. Cette tendance jamais contredite à toujours plus de complexité conduit assez naturellement à une hypothèse téléologique : la finalité, quelle que soit la forme prise, est d’atteindre un niveau de complexité tel qu’il nous sort de notre condition naturelle, physique.

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  6. Je relis les commentaires et ma réponse au vôtre et je me rends compte que j’ai poursuivi mon idée davantage que je ne vous ai répondu : en réalité, nous sommes bien d’accord sur le fait que la pensée de René Girard, dans tous ses développements, tend à réconcilier la raison et la foi, à rendre compatibles et même complémentaires les vérités scientifiques et celles de la théologie. Ce ne sont pas des vérités du même ordre, dirait Pascal, mais la TM démontre qu’elles peuvent s’accorder.

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  7. Je suis impressionné par le niveau de toutes vos interventions. C’est un plaisir de vous lire. L’introduction de la pensée métaphysique de Claude Tresmontant par J-L. Salasc me semble également nécessaire et particulièrement bienvenue. On peut d’ailleurs regretter que Girard l’ait découverte tardivement : ce qu’il reconnaissait lui-même. Bien entendu, et malgré le kantisme que je partageais avec Clavel pour aborder le Livre de Job, en avançant que ce texte constitue une critique radicale de la métaphysique ou « raison théologique » invoquée par ses amis, je dois préciser que « métaphysique » n’est pas un gros mot. Citons Kant : « La raison humaine a cette destinée singulière, dans un genre de ses connaissances, d’être accablée de questions qu’elle ne saurait éviter, car elles lui sont imposées par sa nature même, mais auxquelles elle ne peut répondre, parce qu’elles dépassent totalement le pouvoir de la raison humaine »
    La question posée par Jean-Louis s’inscrit dans ce cadre : puisque nous ne pouvons pas nous empêcher de nous poser ces questions, allons-y gaiement, mais en sachant par avance quelles sont nos limites. Nous pouvons néanmoins poser des hypothèses, ce que Girard revendique : en cela, sa démarche est bien scientifique.
    Plusieurs hypothèses métaphysiques sont en présence, que Jean-Louis nous a rappelées. Pour Tresmontant, qui s’inscrit dans la première (l’univers est engendré par une force créatrice extérieure à lui), la création est un don gratuit de Dieu, dont nous sommes les bénéficiaires. De son côté, James Alison souligne, à travers sa remarquable lecture de Jean, comment ce geste s’inscrit dans cette idée judaïque d’une création continue. Et le rabbin Kryger de poursuivre : « L’injustice en ce monde n’est ni un faux-semblant qui laisse la Toute-puissance intacte, ni une béance inhérente à la nature chaotique d’un monde né du hasard. Elle est le signe de l’inachèvement. Pas seulement du monde, mais aussi de Dieu. »
    Dieu est donc imparfait, dans les deux sens du terme : il n’est pas responsable du mal, ni ne peut prévoir ce qui adviendra, car il est inachevé. En cela, il se fait, et s’est fait historiquement (c’est l’Incarnation), l’égal de l’homme, il s’est soumis aux mêmes contraintes (inscrites dans l’espace et le temps). En conséquence, si le prophétisme reste possible, sa version « moderne » définie par Dupuy par son « catastrophisme éclairé » me semble pouvoir et devoir remplacer toute eschatologie d’ordre théologique, forcément dogmatique puisque ne procédant pas par hypothèses. À ce titre, je préfère définir la situation actuelle comme catastrophique plutôt qu’apocalyptique, sans exclure pour autant qu’elle ne soit une réplique de l’Apocalypse : la Révélation. On ne quitte pas ici la pensée girardienne.
    Pour reprendre la métaphore dans l’article de Jean-Louis : Hitchcock en sait beaucoup plus que Dieu lui-même quant à l’issue du suspens qu’il provoque chez le spectateur. Car si le scénario est écrit dans son cas, il n’en est pas de même dans le monde réel. C’est aussi pour cela qu’il me semble préférable de traduire « èhiè asher èhiè » par « je serai qui je serai » (Ex.3, 14) : la réponse de Dieu à Moïse, qui lui demandait son nom.

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    1. Eh bien, je suis moi-même impressionnée par la qualité des commentaires d’Hervé et Benoît Hamot. Je remarque que les questions philosophiques ont un certain succès ( cet été c’était la question du libre-arbitre, cet hiver, c’est la place qu’on peut faire à la téléologie, trop souvent traitée sur un mode critique).
      Je me souviens d’avoir lu sous la plume d’un prix Nobel de biologie, l’auteur de  » le Hasard et la Nécessité » Jacques Monod, que la finalité était comme la maîtresse du biologiste, il ne pouvait s’en passer mais ne devait pas se montrer en public avec elle.

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  8. Ne pouvant « liker », je voudrais dire ici que j’admire les commentaires de Hervé van Baren et de Benoît Hamot. Les questions philosophiques, je m’en réjouis, suscitent de l’intérêt : cet été, c’était le libre-arbitre, maintenant, c’est la finalité. Merci Jean-Louis.
    Je me souviens avoir lu, sous la plume d’un prix Nobel, Jacques Monod, l’auteur de « Le Hasard et la Nécessité » que la finalité était comme la maîtresse du biologiste, il ne pouvait s’en passer mais ne devait pas se montrer en public avec elle.

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  9. Simple réponse paradoxale au défi de Jean-Louis SALASC, sans argumentation philosophique : Tout désir a une structure téléologique. Mais tout désir n’est pas forcément mimétique. La structure téléologique englobe donc la TM.

    La TM va au-delà et définit un désir d’être. Ce désir d’être peut être aussi une conversion vers une absence de désir (sauf celui de recherche de Dieu). Il se concrétise dans les monastères (quel que soit la religion).
    Le temps est en suspens, sans structure téléologique.
    La Théorie mimétique englobe la structure téléologique.

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  10. Il y a un mot barbare – et cette impression est d’ailleurs particulièrement eclairante et frappante pour nos cerveaux d’occidentaux – que l’on commence à rencontrer de plus en plus dans la presse et les revues : c’est celui de désoccidentalisation.

    Ce mot me paraît avoir sa place ici, dans la référence à Tresmontant par exemple concernant la place d’un dieu dans la création et ses causes finales, ou encore dans l’existence d’un récit ordonné vers une fin, pour en souligner précisément leur aspect local.
    Je crois que la philosophie chinoise, vue à travers le prisme de Claude Julien, apporte des réponses différentes de celles que nous sommes habitués à attendre, et qui rejoignent d’ailleurs les vers de T.S. Eliot sur ces fins qui sont des commencements d’où nous partons.
    Et je crois également que les métaphysiques indiennes, avec la conception d’un brahman extérieur à l’univers quil a créé et auquel les dieux appartiennent, conception dun Absolu hypostasié en trois personnes divines ( Brahmâ pour produire l’univers, Vishnu pour le conserver et Shiva pour le dissoudre lorsque les temps sont venus) sont plus proches des infinis de la cosmologie scientifique contemporaine.

    Il est certain que l’immensité et l’étrangeté de ces modes de pensée constituent de décourageants obstacles. Mais il est possible également que l’avenir nous oblige à en tenir compte, de gré ou de force.

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  11. Après relecture du billet de Jean-Louis, je remarque un passage qui me semble problématique ; « Quel est l’intérêt de cette thèse de l’analogie entre structure téléologique et système Girard ? Il est en premier lieu de nature théorique : c’est le fondement même de la connaissance que de discerner l’identité de phénomènes dont les manifestations sont apparemment différentes. »
    Problématique en effet, car une structure téléologique n’est pas un phénomène. L’une a besoin de l’autre pour exister. Pas de structure sans éléments tangibles, inscrits dans l’espace et le temps, pour la révéler. « C’est le fortuit qui nous révèle l’existence, au jour le jour » (G. Braque). Toute connaissance passe nécessairement par l’expérience (Kant).
    D’autre part, ce qui me semble faire lien entre Girard et Hitchcock, c’est une intelligence du désir, qui atteint son point culminant dans l’attente de la satisfaction, et non dans sa consommation. Comme Dupuy l’a montré à propos de Vertigo, l’intensité désirante éprouvée par Scottie disparait d’un coup lorsque son objet est enfin à sa portée. Il est vrai que cet objet n’est plus exactement celui qu’il attendait, mais il est vrai aussi que l’objet attendu n’a jamais existé… C’est la machination du mari, le médiateur, qui l’a créé de toute pièce.
    N’y a-t-il pas, de la part de Jean-Louis, confusion entre téléologie et désir mimétique ? Si c’est le cas, nous pouvons répondre à la question posée : il n’y a pas de schéma du désir (et non « téléologique ») exempt de médiateur. Ce qui peut se généraliser ainsi : nous évoluons toujours dans un bain mimétique.

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    1. Oui. Mais on pourrait se passer du désir pour travailler avec une « structure téléologique ». C’est le cas des biologistes, n’en déplaise à Darwin. Je recommande la lecture de « Le hasard et la nécessité » et « La logique du vivant » (François Jacob), même s’il y a certainement des livres plus récents sur le sujet.

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      1. Oui Daniel, d’accord avec vous sur Tresmontant, et vous soulignez aussi à juste titre la différence avec Krygier. J’ai pour ma part tendance à suivre Krygier : imperfection parce que Dieu ne se conçoit pas sans la création : il n’est donc pas « autosuffisant » (et par conséquent, il est aussi « imparfait », dans le sens d’inachevé, au même titre que la création). La différence entre ces deux théologiens, c’est que Tresmontant insiste sur le don gratuit de Dieu (sa création) et Krygier sur la relation entre Dieu et l’Homme, à qui il a été confié le soin de parachever la création, s’il le veut bien.
        Certainement Christine, il existe des structures téléologiques qui échappent au désir mimétique. Mais Jean-Louis nous a posé un piège redoutable, me semble-il, en plaçant sur le même plan une structure téléologique religieuse : c’est-à-dire une eschatologie, et les scénarios conçus par Hitchcock, qui relèvent de la structure du désir mimétique. L’essai de Dupuy (variations sur Vertigo, inclus dans : La marque du sacré) franchit un, voire deux « crans » de plus, puisque d’une part :
        1- il nous expliquer en quoi le fait d’avoir vu ce film, d’être devenu follement amoureux de son actrice, l’a amené à élaborer sa métaphysique du « temps du projet », qu’il appliquera aux principaux phénomènes collectifs, qui de fait, n’ont apparemment plus rien à voir avec le désir.
        2- il revient à contresens sur ce phénomène collectif d’autotranscendance (sacrifice) pour le ramener à la structure du désir, dans laquelle l’objet disparait (cesse d’exister) dès lors qu’apparait la dimension fictionnelle du projet, sous-jacent au désir (dans Vertigo, le projet est celui élaboré par le mari criminel).
        Ce qui revient à dire que même dans une structure téléologique où le désir n’apparait pas, celle-ci ne peut se comprendre qu’à partir du désir, qui en constitue le noyau en quelque sorte, ou le « code génétique » : si je puis risquer cette métaphore, car elle appartient au domaine de la biologie, qui dépasse mes compétences (je ne vous répondrai donc pas sur Monod, car j’en suis incapable). Je me réfère seulement à la théorie mimétique, qui n’est pas si loin de ce domaine scientifique puisqu’elle se définit elle-même comme « morphogénétique ».
        Selon la TM, c’est l’hyper-mimétisme humain qui engendre le désir, qui entraine l’apparition de rivalités telles que la solution sacrificielle apparait, et avec elle, la conscience de notre finitude, le langage, la culture, la faculté de se projeter dans le passé et l’avenir, c’est-à-dire de créer des fictions, le besoin de s’orienter dans le temps, de définir un sens, une origine et une fin, c’est-à-dire une eschatologie ou un projet. Nous voyons bien là que tout est lié, s’engendre à partir d’un noyau désirant.
        Il me parait évident que ces eschatologies et ces projets, forcément soutenus par une métaphysique (qui peut consister en une idéologie), intègrent une dimension imitative, répétitive et même régressive : la flèche du temps n’est pas une ligne droite. Exemple de régression : ce projet juif orthodoxe de sacrifier des vaches rousses pour reconstruire le temple sur une base purifiée, alors que l’eschatologie judaïque prévoyait la destruction du temple, la fin des sacrifices animaux. Exemple d’imitation : l’eschatologie chrétienne imitant l’eschatologie judaïque en annonçant le retour du Christ, une fin des temps catastrophique, la résurrection de la chair… Il me parait important de dégager ces dimensions régressives et imitatives afin de parvenir au réel : je crois que c’est là le projet girardien par excellence. Je précise que le fait d’imiter une eschatologie judaïque historiquement achevée par l’Apocalypse n’est pas forcément une erreur ou une faute, car la Révélation, comme tout tremblement de Terre, produit nécessairement des répliques : encore faut-il le reconnaitre.
        Mais une autre métaphore me parait plus précise : celle du caillou que l’on lance à la surface d’une étendue d’eau. Le choc et la plongée initiale (la Passion suivie de la destruction du temple annoncée, ou Apocalypse) produisent des ondes divergentes, qui rencontrant certains obstacles (rocher, berge…) reviennent en arrière, vers le centre générateur d’ondes, se croisent, etc. Et le tableau finit par devenir indescriptible, d’autant plus qu’il intègre l’ensemble des groupes humains, des cultures et des religions. L’évènement initial est oublié, mais toute la surface est parcourue d’un frémissement apocalyptique dont il devient de plus en plus difficile de déceler l’origine.

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  12. Quelques précisions sur les observations faites à partir de Claude Tresmontant qui toutes s’originent dans son maître ouvrage LES METAPHYSIQUES PRINCIPALES.

    1 La science dont se réclame René Girard est l’anthropologie, celles de Tresmontant sont les sciences dites exactes dont il déduit une métaphysique avec comme finalité l’union de l’homme à Dieu à l’image de l’Homme véritable unit à Dieu véritable sans confusion sans mélange sans séparation.

    2 C’est dans la connaissance de cette finalité que chaque homme, d’abord archaique, est appelé en toute liberté à se métamorphoser (Saint Paul) ou à se convertir (Girard).

    3 Tresmontant défend également avec Rivon Krygier une création continue sans le suivre au sujet de l’imperfection divine, domaine de la gnose selon l’orthodoxie hébraique.

    4 Se passer de désir avec une structure téléologique est justement le travail de Claude Tresmontant qui a ignoré, du coup, René Girard. Ce dernier à l’inverse, n’a pu se passer de philosophie avec ses incursions lumineuses chez Platon Heidegger Derrida…qui lui ont permis de prêter attention et admiration à l’oeuvre de Claude Tresmontant.

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  13. Quelques précisions sur les observations faites en référence à Claude Tresmontant qui toutes s’originent dans son maître ouvrage LES METAPHYSIQUES PRINCIPALES.

    1 la science dont se réclame René Girard est l’anthropologie celles de Tresmontant sont les sciences dites exactes dont il déduit une métaphysique avec comme finalité l’union de l’homme à Dieu à l’image de l’Homme véritable uni à Dieu véritable sans confusion sans mélange sans séparation.

    2 c’est dans la connaissance de cette finalité que chaque homme d’abord archaïque est appelé en toute liberté à se métamorphoser (Saint Paul) à se convertir (René Girard).

    3 Claude Tresmontant défend également avec Rivon Krygier une création continuée sans le suivre sur l’imperfection divine, domaine de la gnose hors de l’orthodoxie hébraïque.

    4 se passer du désir avec une structure téléologique est justement le travail de Claude Tresmontant qui, du coup, a ignoré René Girard. Ce dernier à l’inverse n’a pu se passer de philosophie avec ses incursions lumineuses chez Platon Heidegger Derrida…et qui lui ont permis de prêter attention et admiration à l’œuvre Claude Tresmontant.

    Juillerat Daniel

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  14. La nouvelle interface ne nous donne plus la possibilité de nous identifier, du moins certains d’entre nous. Ce n’est pas très pratique.

    Je pose la question à ceux et celles qui connaissent le poids des mots : si la téleologie apparaît comme peu recommandable, la téléonomie ne pourrait-elle pas constituer un terrain plus solide ?

    Alain

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    1. Suivant mon propre conseil, je suis allée voir chez Monod et Jacob. Ils sont tous deux résolument hostiles aux thèses finalistes, au nom du « principe d’objectivité ». C’est un « choix éthique » pour Monod. Et la « téléonomie » des êtres vivants, qui est un fait d’observation et d’expérience est, en effet, plus « recommandable » que la téléologie : ce fait ne leur paraît nullement en désaccord avec la théorie sélective de Darwin. Au point que Monod conclut que « le hasard pur, le seul hasard, liberté absolue mais aveugle, à la racine du prodigieux de l’évolution, cette notion centrale de la biologie moderne n’est plus aujourd’hui une hypothèse.(…) Elle est la seule concevable, comme seule compatible avec les faits d’observation et d’expérience. » C’est-à-dire avec le choix éthique du principe d’objectivité.
      Ce qui est le plus remarquable, pour un lecteur de Girard, c’est la formule de Jacques Monod dans sa dernière phrase de conclusion. Je cite celle-ci, très fameuse : « L’ancienne alliance est rompue ; l’homme sait enfin qu’il est seul dans l’immensité indifférente de l’Univers dont il a émergé par hasard. Non plus que son destin, son devoir n’est écrit nulle part. A lui de choisir entre le Royaume et les Ténèbres. »
      Le scientifique athée, qui n’a pas le moindre soupçon que soit « écrit quelque part » le chemin à suivre, retrouve les accents de Pascal et sa conclusion est la même que celle de René Girard à la fin des « Choses cachées ».

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      1. Oui, mais si l’ancienne alliance est rompue, d’où lui vient l’idée du Royaume ? « Dieu merci, je suis athée ! » disait l’un…

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      2. Pourriez-vous m’indiquer dans quel écrit se trouve ce mot d’esprit délicieux que vous aviez attribué à J. Monod sur la finalité ?
        L’univers est déterministe, cad que tout fait a une cause, et que si l’on remonte l’enchaînement de ces causes, on doit arriver au temps 0, temps où toutes les causes sont contenues. Cette hypothèse est compatible avec l’idée du dieu démiurge judéo-chrétien. La théorie du big bang l’autorise. Mais le modèle relativiste ne peut penser le temps zéro (on en est à 10-43 s, je crois). Je ne suis pas physicien et je ne veux pas faire le malin mais tout le monde (ou presque) sait qu’il existe d’autres théories pour expliquer l’univers (notamment la plus vulgarisée, celle des cordes). Cela dit, et je reviens là au propos de mes commentaires de l’été, reste le libre arbitre qui chamboule toute réflexion sur la fin (dans les deux sens du terme) de l’univers, et singulièrement, celle de l’humanité. J’ai revu il y a peu le film de Spielberg, Minority Report (d’après Philip Dick), qui pose en termes cinématographiques cette question vertigineuse du libre choix.
        Pour finir, le statut scientifique de la TM est éminemment discutable, comme toutes les théories relevant des « sciences humaines », car elle n’est pas réfutable (critère de Karl Popper). Mais, et c’est peut-être une des raisons pour lesquelles j’y adhère (presque) sans réserve, elle est très performante et parcimonieuse (économe en hypothèses, principe d’Occam).
        C. Julien

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  15. Heureux ceux qui reconnaissent leur pauvreté spirituelle, car le royaume des cieux leur appartient!
    Chouraqui traduit :
    En marche, les humiliés du souffle ! Oui, le royaume des ciels est à eux !

    Ce qui donnerait à penser que nos désirs de perfection, autant dire de domination dans la compréhension, empêchent l’acceptation de notre condition de mortels, seule et unique absence totale de suspens.

    Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés!

    En marche, les endeuillés ! Oui, ils seront réconfortés !

    Oui, Jésus, bien sûr, disait Céline, mais quel ennui ! On veut du sang, demain on mettrait Céline place de la concorde, on le découpe en morceau, ce serait de la bonne distraction.

    Heureux ceux qui sont doux, car ils hériteront la terre!

    En marche, les humbles ! Oui, ils hériteront la terre !

    Gardons bien propre les lèvres d’or de nos blessures, pardon Benoit, Bobin encore, pour parler la Parole qui est avant tout.

    Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés!

    En marche, les affamés et les assoiffés de justice ! Oui, ils seront rassasiés !

    Le désir alors, s’il se place dans la bonne polarité, pourrait donc être satisfait ! Les termes du choix sont scientifiquement révélés, ne reste au suspens que la patience de l’amour, c’est par le bois de la croix que règne Dieu.

    Heureux ceux qui font preuve de bonté, car on aura de la bonté pour eux!

    En marche, les matriciels* ! Oui, ils seront matriciés* !

    Les entrailles de la mère, l’amour qui prend aux tripes comme l’Amour du Père, comme l’instinct qui dicte le devoir, le génie littéraire.

    Heureux ceux qui ont le cœur pur, car ils verront Dieu!

    En marche, les cœurs purs ! Oui, ils verront Elohîms* !

    La neurobiologie désormais voit la place du cœur aux miroirs des neurones, quel suspens, lieu du choix offert.

    Heureux ceux qui procurent la paix, car ils seront appelés fils de Dieu!

    En marche, les faiseurs de paix ! Oui, ils seront criés fils d’Elohîms.

    Plus de Deus ex machina, cri d’amour des frères et des sœurs, souffrance du chagrin qui désormais a capacité d’écrire son destin.

    Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, car le royaume des cieux leur appartient!

    En marche, les persécutés à cause de la justice ! Oui, le royaume des ciels est à eux !

    Autant dire à nous, debout, sans sacrifice mais jusqu’à la mort, don enfin à la patience sous les huées de la meute déçue qui se détourne et préfère l’oppression.

    Heureux serez-vous lorsqu’on vous insultera, qu’on vous persécutera et qu’on dira faussement de vous toute sorte de mal à cause de moi.

    En marche, quand ils vous outragent et vous persécutent, en mentant vous accusent de tout crime, à cause de moi.

    Oui, à cause de lui.

    Réjouissez-vous et soyez dans l’allégresse, parce que votre récompense sera grande au ciel.

    Jubilez, exultez ! Votre salaire est grand aux ciels ! Oui, ainsi ont-ils persécuté les inspirés, ceux d’avant vous.

    En marche, il est urgent d’aimer car la vie passe, nos dés qui jamais n’abolissent le hasard jetés aux vents de l’Esprit, rendez-vous pris à Emmaüs.

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  16. Merci Aliocha, pour ces pèlerins d’Emmaüs.
    Pour M. Julien : Je n’ai lu de Jacques Monod que « Le Hasard et la Nécessité », un travail largement consacré à critiquer la téléologie sous toutes ses formes (animisme, vitalisme, théologie etc.) et à présenter comme un fait compatible avec la thèse darwinienne du Hasard, la téléonomie des êtres vivants. C’est là que j’ai trouvé son « mot d’esprit » sur l’indécence qu’il y aurait pour un biologiste à afficher son attachement ou sa dépendance à l’égard de la finalité.

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    1. Merci.
      L’image peut paraitre curieuse ainsi envoyée sans le texte qui la précédait et que, avec la nouvelle interface, je n’avais pas pu ou su signer.
      Peut-être, comme cela est déjà arrivé, il ressortira des méandres virtuels pour apparaitre. Je l’espère car je n’en ai pas gardé trace, me souvenant simplement qu’il se concluait sur :
      Il est urgent d’aimer car la vie passe, nos dés qui pourtant jamais n’aboliront le hasard jetés aux vents de l’Esprit, rendez-vous pris à Emmaüs.

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  17. Juillerat Daniel

    Enchaînement de pensées :

    1 Interpellé par la dernière intervention de Christine Orsini en référence à Monod et Jacob où j’y percevais des oxymores et nécessitait conséquemment une déconstruction toujours à partir du livre de Claude Tresmontant.

    2 Benoit Hamot, forçant mon attention sur «l’Ancienne Alliance rompue», me fit percevoir la longue tradition de résistance à la révélation judéo-chrétienne.

    3 C’est à la demande d’un ami éditeur de la revue LUVAH, qui paraîtra fin décembre, et traîtant du chant, que j’ai essayé de montrer, à contrario, l’actualité du Cantique des Cantiques*.

    4 Quelques extraits de ce texte «le verset manquant»
    «Le Cantique des Cantiques est un album d’Alain Bashung et Chloé Mons»
    «absence du verset 6.12 par rapport à la traduction d’André Chouraqui»
    «verset pivot entre le destin ou violence du monde et le libre arbitre ou violence
    faite au monde»
    «verset qui est aussi l’énonciation d’une conversion (1)»
    «première partie la violence du monde»
    «deuxième partie la violence faite au monde»
    «Parole première…Parole d’Alliance…Immémoriale…contre le feu de l’ardeur ou jalousie»
    «c’est ce feu d’un amour jaloux qui motivera les frères, protecteurs excessifs et feront de leur petite soeur une jeune fille « sans manque » et par là se montreront littéralement « in-cestueux »
    «la réponse sublime révélera une «Parole de Vie» liant corps et pensée pour être partagée avec des amis…»

    * : Alliance ancrée dans le réel de l’expérience faite en toute liberté.

    note (1) : référence est faite au livre de Benoît Chantre «René Girard une biographie» p.350.
    La conversion dont parle Benoît Chantre, en conjuguant la violence du monde et la violence faite au monde, prépare et annonce celle finalisée par l’essai de critique littéraire «Mensonge romantique et vérité romanesque» de René Girard. La conversion serait le passage du mensonge romantique (désir solipsiste ou égoïsme métaphysique) à la vérité romanesque (amour de l’Autre dans son acceptation de génitif objectif et subjectif).

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  18. Mince, il n’y aura pas de miracle virtuel, et la comparaison entre la traduction Segond des Béatitudes et celle de Chouraqui que j’avais opérée semble disparue à jamais.
    Qu’importe, mais l’intervention de Daniel Juillerat m’en rappelle une bribe, pillée par les humiliés du souffle à la source des personnages de roman :

    7 Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde!

    7 En marche, les matriciels* ! Oui, ils seront matriciés* !

    *matriciels : de matrice = qui dispense la vie. Amour du Père autant masculin que féminin « avoir des entrailles de mère, un amour qui prend aux tripes… »

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  19. Juillerat Daniel

    Si,Aliocha, il y a un miracle virtuel me concernant, celui du passage de l’ignorance à la connaissance en passant par la médiation de Mathieu 5.3 (Chouraqui) «En marche les humiliés du souffle! Oui,le royaume des ciels est à eux».
    Pour information, je voulais simplement écrire que le Cantique des Cantiques se prête parfaitement à la démonstration de Benoît Chantre lue p350 dans son livre sur René Girard, ce qui, pour moi, est un petit miracle mais surtout que ce poème révèle la présence du Logos de vie depuis l’origine. Peut-être ai-je des joies trop infantines ?
    Mais il est possible que je fasse erreur sur la visée que vous donnez à votre billet, dans ce cas veuillez m’en excuser.

    A l’intention de Mme Orsini : je me réfèrais aux oxymores ou aux confusions de registres selon le texte cité de Jacques Monod ainsi «du hasard comme liberté absolue mais aveugle» ou «choix éthique du principe d’objectivité».
    Dans de nombreux ouvrages (les METAPHYSIQUES PRINCIPALES déjà cité, l’HISTOIRE DE L’UNIVERS et le sens de la création…) Claude Tresmontant montre que si l’éthique du chercheur, ici biologiste,lui impose de se passer de Dieu, il la prolonge souvent lorsqu’il passe à la métaphysique ce qui devient alors un apriori masquant, souvent, une résistance au Dieu incréé judéo-chrétien.

    Et pour recadrer l’ensemble de mes propos j’ajouterai que je suis animé par une perception dans ce long échange, peut-être à tord, de trop « d’imanentisme » au détriment de la transcendance de Dieu.

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    1. Aucun problème, vous êtes tout excusé, le méandre virtuel concerne un texte que j’avais écrit qui n’est pas passé, qu’il se soit perdu après un clic trop rapide sur « réponse » ou qu’il ait été modéré, ce qui est possible aussi.
      J’y commentais les béatitudes dans les deux traductions déjà citées précédemment, dont celle de Chouraqui qui motivait mon rapprochement avec votre commentaire, car je partage cette joie enfantine de la foi, qu’il est à mon sens possible depuis Girard d’éprouver en pleine conscience comme le choix raisonnable défini par Benoit XVI.

      « Le génie n’est que l’enfance nettement formulée. »

      Ch.Baudelaire

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