
Une conférence de Madeleine Brossier
Normalienne (Ecole Normale Supérieure de Lyon), agrégée de Lettres Classiques, Madeleine Brossier a soutenu en 2024 une thèse en langue et littérature françaises intitulée « Philippe Jaccottet, la poésie et le doute ». Elle aime à entremêler les approches littéraires et philosophiques. Sa recherche porte notamment sur le nihilisme et sur l’expérience poétique comme donation. Elle donnera une visioconférence le 5 novembre prochain à 19 heures. Elle y analyse Dostoïevski à la lumière du tout premier essai de René Girard, un Girard d’avant Girard en quelque sorte, dans lequel se trouvent cependant les prémisses de sa pensée : il s’agit de « La Naïveté du rire » (Grasset, 2025, 180 pages). L’ouvrage, jamais publié, vient de l’être par les soins de Benoît Chantre.
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Présentation de la conférence
René Girard, dès son tout premier essai inédit de 1955, « Naïveté du rire » (Grasset, 2025), notait que le rire est contagieux. Mais de quelle contagion s’agit-il, et de quel rire ? Les personnages de Dostoïevski sont ici d’un grand secours, parce qu’ils nous incitent à distinguer le rire de la dérision de celui de la gaieté, à mesurer leurs implications respectives dans une société risquant la dissolution. Le rire de dérision induit un surplomb, mais le rieur se voit menacé de l’arrivée d’un autre rieur, qui se moquerait de lui à son tour. Qu’est-ce que le nihilisme sinon l’expérience de ce rire poussé à l’extrême, jusqu’au point où tout devient risible, jusqu’au dernier surplomb où le contrôle que le sujet transcendantal voulait exercer par la pensée sur le monde et sur lui-même se brise, comme autant d’éclats de rire ? La situation du nihiliste est tragique. En effet, la dérision le sépare non seulement d’autrui, mais de lui-même, si bien que son identité se disloque dans le rire. L’autre, qu’il avait expulsé par le rire, lui devient nécessaire pour retrouver un surplomb, de sorte que le nihiliste prêche et appelle de ses vœux une contagion du ricanement, tout en méprisant quiconque ricanerait avec lui. Mais cette contagion ratée ne trahit-elle pas surtout le vœu de briser l’orbe du solipsisme, l’aspiration nostalgique à communier dans le rire de la gaieté ? Ce rire-là seul, expansion du sourire, comme le dit René Girard dans son essai de 1955, rend possible une contagion du rire qui tire la conscience souterraine de sa solitude.
Il sera principalement question des Carnets du sous-sol, de L’Idiot et des Frères Karamazov.
Bonjour, j’espère que la visioconférence sera accessible après la date du filmage.
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